Playdoyer pour les « croyants hors sol »

Dans le numéro du Tarn Libre paru le 7 septembre, un prêtre a écrit un article intitulé « Liberté de conscience... pour les prêtres ». Il exprime sa contrariété parce qu’il lui arrive, lors de demandes sacramentelles (baptême, mariage...) d’agir contre sa conscience. Son malaise vient de ce que, dit-il, « des parents d’enfants à baptiser n’ont vraiment pas la foi ». Est-ce à dire qu’ils n’ont plus les connaissances catéchétiques de leur enfance ? Qu’ils n’ont plus les mots adéquats pour en parler ? Ou encore qu’ils ont perdu confiance dans ce que donne à voir l’Église ?

Je comprends ce que veut dire ce confrère mais, pour ma part, je pose un regard quelque peu différent sur tout cela : du côté de l’Évangile, nous pouvons retrouver un enseignement bénéfique pour aujourd’hui. Des théologiens se sont intéressés à ceux qu’ils appellent les « anonymes de l’Évangile ». Ils relèvent que la plupart de ceux qui ont écouté Jésus ou qui ont été guéris disparaissent dans la suite des récits. Ils sont venus à lui ou bien Jésus est allé vers eux, ils ont imploré un geste du Christ pour un des leurs. La rencontre a été unique et quelque chose d’important est advenu pour eux ou leur proche : guérison du corps, pardon des péchés, réintégration familiale ou sociale.

L’Évangile ne nous dit rien de ce qu’ils sont devenus ; preuve en est que très peu de malades sont nommés. Ils ne portent que le nom de leur misère : l’aveugle, le lépreux, le paralytique, le sourd-muet, mais dans cet événement, il y a la perception souvent fugitive, parfois incomplète, du mystère de Jésus.

Cette perspective évangélique me libère de tout jugement hâtif sur ces chrétiens, nombreux aujourd’hui, que l’on peut désigner par les « anonymes de l’Évangile » ou encore les « catholiques hors sol ». Tout en prenant soin de l’animation de communautés chrétiennes, je reste soucieux de susciter une attitude évangélique chez tous ceux qui s’adressent à l’Église. À travers leurs demandes, même ambiguës on peut entendre le désir d’authentifier un moment-clé de leur vie, que ce soit pour célébrer une naissance, un amour ou une présence au moment d’un deuil.

L’essentiel ne serait-ce pas d’aimer l’autre dans sa requête, même si elle semble sonner creux ?

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Michel AMALRIC

Prêtre du diocèse d’Albi, chargé de la communication.

Publié: 01/12/2018