Tu deviens blanc

Désiré, un Malien de 38 ans, partenaire du CCFD (Comité catholique contre la faim et pour le développement) était de passage en France. Lors d’une rencontre, il expliquait comment on vit en famille dans son pays. Pour exemple : plus les revenus sont grands, plus le chef de famille doit prendre en charge les membres de sa famille. C’est ainsi que vivent chez lui deux de ses sœurs dont l’une avec son enfant ainsi qu’une amie. Si le chef de famille n’agit pas ainsi, il s’entend dire : « Tu deviens blanc ! » En écoutant Désiré, les « blancs » ont bien le sentiment qu’ils ne sont pas perçus comme les champions de l’hospitalité.

Par son intervention, Désiré nous place bien au cœur de ce que sont nos relations avec les Africains comme avec tous ceux qui vivent dans des pays moins riches que le nôtre. Le donateur condescendant qui peut se croire supérieur n’existe plus dès l’instant qu’il cherche à devenir « partenaire ». Ce terme évoque une relation, un échange qui renverse le schéma du donateur et du bienfaiteur. N’est-ce pas les uns et les autres, blancs et noirs, qui le deviennent tour à tour ? Ce terme de « partenaire », utilisé par plusieurs ONG, fait son chemin et sous-entend une pédagogie originale pour le développement. Sommes-nous prêts, par exemple, à entendre des Africains nous inviter à mieux vivre l’hospitalité chez nous ?

Au cours de la soirée, par sa vision des problèmes économiques et sociaux du Mali, Désiré bouscule nos images et nos idées reçues. Son implication dans un collectif d’associations, travaillant pour le développement avec des plans que les femmes ont elles-mêmes élaborés est significative. Il évoque de multiples actions de leur part, qui ont créé des coopératives pour la commercialisation de leur artisanat. Il insiste aussi sur la sensibilisation aux problèmes de l’excision qui reste un véritable drame pour beaucoup d’entre elles.

Quant à l’image que ce Malien se faisait de la France Eldorado, la voilà balayée par les réalités qu’il y découvre : personnes sans travail, parfois seules et dans des situations de pauvreté. Il saura en parler, au retour à ses concitoyens désireux de quitter leur pays. Si un Africain peut s’entendre dire « Tu deviens blanc ! », prenons-nous le risque d’entendre quelqu’un nous dire « Tu deviens noir ! » ? La voie d’un vrai développement pour les uns et les autres passe par un certain métissage qui nous amène à grandir avec l’autre et non comme l’autre. Un vrai plan de partenariat !

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Michel AMALRIC

Prêtre du diocèse d’Albi, chargé de la communication.

Publié: 01/05/2022