7e dim. ordinaire
1. « Vous avez appris qu’il a été dit : œil pour œil, et dent. » On lit en effet dans le livre de l’Exode : « Mais si un malheur arrive, tu paieras vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure, blessure pour blessure, meurtrissure pour meurtrissure. » Cette loi, dite loi du talion, se trouvait déjà inscrite sur la stèle d’Hammourabi, le plus ancien code babylonien datant de 1750 avant J.-C., que l’on peut voir au Louvre. Cette loi signifie clairement que les peines prescrites doivent être proportionnelles aux torts causés. Grande, en effet, est la tentation de punir plus durement pour montrer qu’on est le plus fort et dissuader l’autre de recommencer, ce qui conduira à une escalade dans la violence sans limite, sans fin. Une loi juste, donc, que celle du talion qui n’est pas une loi de coercition mais de juste rétribution.
2. « Eh bien ! moi je vous dis de pas résister au méchant… aimez vos ennemis. » Tout le contraire. Surprenant et tellement dérangeant ! En effet, si aimer, on sait un peu faire, aimer ceux qui vous font du mal, est-ce possible ? Comment des parents pourraient-ils pardonner à ce chauffard qui, sous emprise de stupéfiant, a tué leur enfant ? Comment ces personnes abusées dans leur enfance, marquées à vie, d’autant plus indignés parce qu’elles l’ont été sous l’emprise de la religion, pourraient-elles pardonner à leurs violeurs ? La nature s’y refuse. Jésus n’a pas pu demander cela !
3. Ce qu’il demande à ses disciples n’est rien d’autre que ce qu’il vécut lui-même. Dans ce « moi, je vous dis… » il y a toute son histoire personnelle. Dans ce qu’il eut à subir d’abord. Il fut confronté tout au long de son parcours à l’opposition de ses concitoyens les plus religieux. Hérétique, pour les uns, possédé par Belzébul, le dieu du fumier, pour d’autres. Dans ce « moi, je vous dis.. » il y a aussi tout ce qu’il montra à ses disciples. Comme ce jour où il fit les plus vifs reproches à ses disciples qui voulaient faire tomber le feu du ciel sur ceux qui les avaient mal accueillis dans un village de Samarie parce qu’ils se rendaient à Jérusalem, la ville ennemie. A Pierre qui voulait prendre les armes au moment de l’arrestation de son maître, il demanda de rentrer son épée dans le fourreau. La non-violence au lieu de la vengeance. Ses ennemis furent ceux qui le combattirent sur le terrain qui était le sien : celui de la paix, de l’entraide, du partage, de la compassion, du pardon. Il ne s’agit pas de sentiments comme pourrait le faire croire son invitation à aimer. Il s’agit d’actes à contre-courant de ceux de la vengeance, de la violence.
4. Ce qu’il vécut, Jésus le vit advenir à ses disciples parce que « le disciple n’est pas au-dessus de son maître ». Alors, en quelques formules parlantes, il les met devant des situations frappantes. Si on te frappe sur la joue, tends l’autre pour lui signifier que tu ne rendras gifle pas pour gifle et que tu refuses la vengeance. A celui qui veut accaparer le bien d’autrui, montre-lui le partage. Ne passe pas de l’autre côté du trottoir si l’on fait appel à ton aide. Ne choisis pas ceux à qui tu souhaites faire du bien car ton Père des Cieux ne fait pas de discrimination. Si la bienveillance est déjà dans votre esprit, elle doit se voir dans la bienfaisance de vos actes. Avec le risque de le payer cher.
5. Ils furent nombreux par la suite à le payer cher. Après Etienne qu’on lapida cruellement parce qu’il était l’un de ses disciples, après Paul qui fut pris à partie dans chaque ville qu’il abordait et subit la persécution de Néron, les chrétiens furent persécutés et le sont toujours en de nombreux pays. Comme, férocement, au Nicaragua, où l’évêque de Matagalpa, soutien des paysans victimes de l’exploitation des ressources, condamné à 26 ans de prison « pour conspiration et diffusion de fausses nouvelles », vient de choisir de la subir plutôt que l’exil qui lui était proposé pour le faire taire. Mais n’oublions pas tout de même que les chrétiens furent aussi persécuteurs et trahirent tout au long de l’histoire leur vocation de disciples. En Allemagne nazie, dans les catalogues des magasins de jouets diffusés pendant la période des fêtes de Noël, on trouve des soldats SS en chocolat, des chars, des avions de chasse et des mitrailleuses. Cyrille, le patriarche de Moscou, soutient ouvertement l’agression de l’Ukraine.
Le pape François a confié à son réseau mondial de prière pour l’année 2024 de prier « pour que ceux qui dans diverses parties du monde risquent leur vie pour l’Evangile, contaminent l’Eglise par leur courage et leurs élans missionnaires ».
Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.
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