24e dimanche ordinaire

1. La parabole du débiteur ingrat et impitoyable se termine par un jugement sans appel : « Serviteur mauvais ! Je t’avais remis toute cette dette parce que tu m’avais supplié. Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même j’avais eu pitié de toi ? Dans sa colère, son maître le livra aux bourreaux jusqu’à ce qu’il ait remboursé toute sa dette. » Il devait 10 000 talents soit l’équivalent de plusieurs siècles de travail pour un ouvrier rémunéré un denier par jour à l’époque. La disproportion des dettes est voulue. Elle veut mettre en relief l’immensité de la miséricorde de Dieu, parce que c’est lui ce maître de la parabole, en face de la pauvreté de la nôtre. Ce débiteur n’a pas su apprécier ce don divin et n’a pas consenti à l’imiter. Il n’a pas seulement manqué de reconnaissance mais n’a pas voulu prendre cette miséricorde en exemple pour accorder la sienne.

2. La miséricorde de Dieu est un des thèmes favoris de Jésus. Il appelle à regarder très haut : « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux. Il fait pleuvoir sur les justes et les injustes. » Luc la met au premier rang de l’enseignement et des comportements de Jésus. Six autres paraboles en attestent. Nommément comme celle du bon Samaritain, du père et des deux fils, de la brebis perdue. Et à contre-pied, celle du riche et de Lazare, des deux hommes en prière au Temple. Lui-même en fut le porteur lorsqu’il accueillit la pécheresse en larmes, lorsqu’il demanda à Zachée le publicain de demeurer chez lui. L’évangéliste Matthieu en fait le critère du jugement dernier.

3. Ce débiteur impitoyable pour celui qui lui devait comparativement si peu fut d’abord un ingrat. Il ne sut pas apprécier le don qui lui fut accordé et a manqué de reconnaissance envers ce maître. Il lui a demandé du temps pour le rembourser et reçu en échange sa compassion qui, elle, venait du cœur et d’aucune autre attente. Savoir dire merci est la première marche à gravir pour s’approcher de Jésus. Ce qu’il fit lui-même pour ceux qui lui avaient fait le meilleur accueil : « Je te loue, Père, d’avoir révélé cela aux tout petits. » Il l’attendait des dix lépreux guéris mais un seul est revenu et c’était un Samaritain. Il obligea Simon, ce pharisien qui l’avait invité à sa table et s’offusquait du pardon accordé à la pécheresse repentante, à le reconnaître : « « Un créancier avait deux débiteurs ; l’un lui devait 500 derniers, l’autre 50. Comme ils n’avaient pas de quoi rembourser, il fit grâce de leur dette à tous deux. Lequel des deux l’aimera le plus ? » Simon répondit : « Je pense que c’est celui auquel il a fait grâce de la plus grande dette. » Jésus lui dit :« Tu as bien jugé. » Nous sommes, nous aussi, concernés. Nous attendons toujours beaucoup de mercis des autres et ne savons pas en dire autant. Tout particulièrement aux personnes qui se mettent à notre service comme les soignants entre autres. « Ils sont payés pour ! » est un énorme manque de discernement et une injure à leur dévouement.

4. Ce débiteur impitoyable et ingrat fut aussi de la plus grande dureté de cœur. Il ne sut pas ou ne voulut pas prendre exemple sur la conduite de son maître. En condamnant son débiteur de cent talents à la prison jusqu’à ce qu’il ait remboursé sa dette, il en prend le contre-pied. Ce qui lui valut condamnation. Un fabliau du Moyen Age l’illustre à sa manière. Pour se défaire d’un aïeul devenu encombrant, un couple ordonne à leur fils d’aller prendre la couverture du cheval pour ne pas le laisser partir sans rien pour se couvrir. Le fils revient avec la moitié de la couverture qu’il avait coupée. A ses parents qui s’en offusquent et lui en demandent la raison, il répond : « L’autre moitié je la réserve pour vous ! » N’attendons pas de devoir recourir au dévouement des autres pour mettre le nôtre en service. On fera bien de se rappeler souvent la parole d’un pape du 6e siècle, Grégoire le Grand : « Quand on ne fait pas ce qu’il faut quand on le peut, il arrive qu’on ne puisse plus le faire quand on le veut. » Sans oublier celle d’Alphonse de Liguori : « Faites le bon propos de vivre ce jour comme si c’était le dernier de votre vie. » Non pas dans l’angoisse mais pour voir et vivre autrement le présent. Je le commencerai, chaque matin, en te disant MERCI !

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 17/09/2023