24e dim. ordinaire (17/9) : Pistes pour l’homélie

Comme dans beaucoup d’autres récits d’évangile nous tombons ici dans la démesure et une énorme exagération. Un homme devait 10 000 talents ! Cela ne nous dit pas grand-chose mais si nous transposons, cette somme équivaut à 60 millions de pièces d’argent. Une dette aussi fantastique ne représente évidemment pas une dette possible, qu’un homme pourrait avoir envers un autre homme, mais c’est peut-être celle que tout homme a vis-à-vis de Dieu, personnifié ici par le roi.
Par cette exagération, Jésus veut signifier qu’à l’égard de Dieu nous sommes débiteurs de tout, parce que nous avons tout reçu, directement ou indirectement : l’univers où nous sommes venus au monde, la vie qui nous a été transmise, l’intelligence qui nous permet de nous approprier la culture de la société humaine, la liberté qui nous affirme comme une personnalité unique… bref, tout nous est donné !
Il va de soi qu’il est impossible de rembourser une telle dette.
Et pourtant cet homme endetté de l’Evangile y prétend : « Prenez patience envers moi, dit-il, et je rembourserai tout ! » Cet homme a la prétention de tout rembourser, ce n’est pour lui qu’une question de temps. S’il est quelque peu lucide et réaliste, il doit quand même bien se dire au fond de lui-même que c’est impossible, qu’il n’y arrivera jamais.
En répondant de la sorte, il refuse de reconnaître ses limites, sa faiblesse, il croit que tout lui est possible, qu’il est tout-puissant. Il traite avec Dieu d’égal à égal. Tu me donnes et je te rends et puis on est quitte.
Une manière de se débarrasser de Dieu, Dieu n’est plus Dieu.

Mais dans la parabole Jésus dit : « Abandonne tes comptes, Dieu te dit que tu ne lui dois rien. Le Royaume des cieux est le monde de la gratuité. Cette dette incommensurable que tu as envers Dieu ne fait pas de toi un débiteur insolvable mais te révèle l’amour du Père pour toi. Il t’invite à entrer dans le Royaume où tout est grâce, amour, pardon, tendresse, émerveillement… Quand tu découvres cela, tu entres dans la reconnaissance qui balaie toute envie de prétendre rembourser Dieu ou d’obtenir par contrainte que ton frère te rembourse le peu que tu lui as procuré pour vivre dans le respect et la dignité. »
Quitter la logique du donnant-donnant pour entrer dans la logique du don, de la gratuité, de la grâce, voilà à quoi l’évangile nous invite.
Puisque nous-mêmes nous avons tout reçu, il n’est que juste de rendre à notre tour c’est-à-dire de donner aux autres la chance de vivre, en osant le partage, la gratuité, le don, jusqu’au par-don.

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Georges LAMOTTE

Prêtre du diocèse de Namur, † 2017.

(re)publié: 17/08/2023