Solennité du Christ-Roi

1. Ils ne s’étaient jamais rencontrés et les voilà face à face. Lui, Pilate, assis sur ce siège de gouverneur, installé par Rome, avec pouvoir de vie et de mort pour faire respecter la "pax romana", la paix romaine, en utilisant toute la force et la violence nécessaires. S’il est là, lui Jésus, c’est parce qu’il a été accusé de blasphème par les chefs du Temple, le Sanhédrin, et que cela méritait la mort. Pour ce motif, ils pouvaient l’appliquer mais par crainte de la foule, favorable à Jésus, ils choisirent de passer par le gouverneur romain, et trouver des motifs qui puissent le conduire à l’exécuter. Se dire roi, fomenter une révolte, refuser de payer l’impôt romain sont autant de motifs suffisants pour y conduire sans retenue. Six mille esclaves gladiateurs furent crucifiés sur la via Appia après la défaite de la révolte conduite par Spartacus, l’un d’entre eux.

2. « Es-tu le roi des Juifs » demande Pilate ? « Ma royauté n’est pas de ce monde » répond Jésus. On sait ce qu’il entend par là. "Pilate, tu tiens ton pouvoir de Rome et tu lui dois obéissance sous peine d’être relevé et exilé. Moi je le tiens du Père qui m’a envoyé et avec qui je suis un et je fais ce que je vois faire à mon Père librement.
Pilate, tu dois mettre les gens que tu gouvernes au service de Rome, et pour cela lever l’impôt, faire régner l’ordre par tes armées et par la peur. Moi, j’appelle chaque conscience au don, à l’amour, au service de l’autre avec des gestes libres, volontaires, source de joie et non de peur.
Pilate, tu crois que le monde est partagé en deux : d’une part ceux qui possèdent et sont libres et d’autre part ceux qui sont esclaves et doivent le rester. Moi je suis venu dire que tous les hommes ont un même Père et sont frères.
Pilate, le Royaume que tu sers n’aura de vie que le temps des hommes qui l’instaurent. Mon Royaume, parce qu’il ne vient pas d’ici mais des Cieux, n’aura pas de fin. Telle est la Vérité pour laquelle je suis venu en ce monde.
Parce que Pilate était Pilate, parce que là où il était, par ce qu’il pensait, de par ce qu’il faisait, Pilate ne pouvait pas comprendre.

3. Pilate est mort. Jésus, lui, n’est pas mort. Dans ce monde terrifié, terrifiant, il y a toujours des voix pour dire, faire entendre son message. Les nôtres à condition qu’il se voie dans nos pensées, nos actes, nos comportements.
Origène, un Père de l’Eglise né en 183 à Alexandrie, a écrit : « Il est évident que celui prie que vienne le règne de Dieu prie avec raison qu’en lui s’élève, fructifie, s’achève le règne de Dieu. » S’il vit en nous. Avant d’imaginer une royauté établie à la fin des temps, il faut commencer à l’instaurer en nous sinon elle n’est qu’un vœu pieux. Alors le pourquoi de notre vie trouvera une réponse d’une autre dimension que celle que nous pouvons imaginer.
« D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? » est le titre d’une toile de Gauguin, considérée comme son chef d’œuvre.
Dans le domaine scientifique, c’est aussi le titre d’un ouvrage de l’abbé Moreux, célèbre astronome, météorologue, photographe, mathématicien, géographe. D’où nous venons sur cette terre, où nous allons après l’avoir quittée, nos connaissances humaines ne savent que dire. Mais ce que nous sommes, nous le construisons chaque jour au gré des événements sans trop nous rendre compte. Le Christ Jésus nous montre le chemin qui conduit, jour après jour, vers son Royaume.