23e dimanche ordinaire

1. « De grandes foules faisaient route avec Jésus. Il se retourne et leur dit : “Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs et même sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple.” » En mettant au second rang leurs êtres plus chers, unis par les liens les plus profonds, ceux du sang, de la famille, sans lesquels leur vie quotidienne perdrait toute saveur, Jésus a de quoi décourager définitivement ceux qui le suivent.
2. Pourtant, à l’inverse, il a traité d’hypocrites ceux choisissaient de donner au Temple ce qu’ils devaient à leurs parents pour les soutenir dans leur vieillesse. Il a appelé à lui les enfants qu’on voulait écarter pour les bénir, a proposé à ses disciples leur simplicité de cœur. Qui plus que lui a parlé de l’amour qui doit faire des hommes une grande famille sous le regard du Père ? Qui plus que lui s’est mis en tenue de service pour nous montrer combien l’homme lui était cher ? Alors pourquoi Jésus parle-t-il ainsi, au risque de dissuader des bonnes volontés qui souhaiteraient s’engager sans perdre leurs racines humaines, celles-là même qu’a voulues le Créateur ?
3. La raison en est peut-être dans le fait que Jésus avait bien remarqué que beaucoup ne voyaient en lui qu’un guérisseur pour certains, ou du pain qui ne s’épuiserait pas pour d’autres, et voulaient même en faire un roi qui chasserait les Romains. C’est ainsi qu’ils avaient compris ses promesses sur cette colline de Galilée : « Bienheureux les pauvres, ils seront rassasiés, les persécutés, il leur sera fait justice, ceux qui pleurent, ils seront consolés. » Tous n’attendaient que cela. Sûr, il allait arriver ce jour de libération tant attendue. En commençant pour ses plus proches, les Apôtres qui, le jour de son départ, lui posent encore la question : « Seigneur, est-ce maintenant que tu vas rétablir le royaume pour Israël ? »
4. Mais Jésus n’a cessé de leur dire qu’ils se trompaient, ceux qui le suivaient dans l’attente de la santé, du pain, des premières places. Il s’est enfui, lorsqu’après la distribution du pain et des poissons multipliés, on voulut le faire roi. « Ce n’est pas seulement de pain que l’homme vivra, mais de toute parole sortant de la bouche de Dieu. » Sa mission n’était pas de nous donner plus de richesse, plus de santé, plus de pouvoir. Le suivre pour ces raisons là, c’est bâtir une tour qu’on ne verra jamais terminée ; c’est partir en guerre sans jamais être en mesure de la gagner. C’est suivre une illusion, choisir une route qui ne mène nulle part.
5. La dernière parole, courte, emmène sur un autre chemin : « Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple ! » Selon le dictionnaire et l’avis commun, porter sa croix, c’est accepter les épreuves, « faire avec » comme on dit. Les philosophes grecs, les stoïciens, le disaient déjà : « Accepte ce que tu ne peux changer ! » Jésus a voulu dire bien autre chose. Il n’a pas dit « Souffrez et vous serez mes disciples ». Ce que Jésus a porté, c’est le péché du monde ! Marcher à sa suite, c’est l’accompagner sur ce chemin. Jésus nous demande de revenir de nos champs, comme Simon de Cyrène, pour mettre nos intérêts au second plan lorsqu’il s’agit de prendre sur soi, sur son temps, sur ses biens, pour apporter une aide, une parole, un geste à qui en a besoin. Porter la croix des autres nous rapproche de Jésus, nous aide à porter notre propre croix.


A bout de bras, Seigneur, tu as porté
Les croix des hommes et leurs blessures
En venant marcher à leurs côtés
Et les mener par les chemins de droiture.

Sur les bras de la croix, tu t’es laissé crucifier
Pour ne pas échapper au sort des maltraités
Et connaître les bourreaux et leur cruauté
Qui ne savaient pas quel amour ils ont fait exploser.

Sous les bras de la croix tu es descendu, reposé,
Remis à nouveau entre les mains des hommes
Pour qu’ils puisent présenter au Père Bien-Aimé
La seule offrande digne de l’Amour qu’il leur donne.

Ne laisse pas, Seigneur, mes bras se refermer
Sur la botte de tous mes vains espoirs déçus.
Que mon regard, à ta croix suspendu,
Les ouvre à celui qui me les tend, tout à côté.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 04/09/2022