5e dimanche du temps ordinaire
1. Le récit de la pêche dite « miraculeuse » est bien connu. On ne le trouve que sous la plume de Luc qui n’était pourtant ni pêcheur, ni présent. On y a vu la toute-puissance de Jésus à l’œuvre. Pourtant Jésus a toujours refusé de faire les prodiges qu’on lui demandait et il a déçu beaucoup de monde. Il faut donc chercher ailleurs la raison pour laquelle Luc a rédigé un récit qui appartient au merveilleux. Ce genre littéraire a toujours été employé dans le culture populaire. Mais il y a plus ici. Un Père de l’Eglise disait à ses auditeurs : « Considère chaque détail de l’Écriture. Pour qui sait creuser profond, chacun renferme un trésor. Là même où peut-être on s’y attend le moins, se cachent les joyaux précieux des mystères. » Où est-il caché, ce trésor, cet enseignement ?
2. On est tout au début de la mission de Jésus. Il n’avait pas encore de disciples mais il connaissait Simon dont il avait guéri la belle-mère peu de temps auparavant. D’autres guérisons lui étaient imputées et sa renommée s’était répandue dans tout le pays. Alors, ce jour-là, ils sont venus nombreux ceux qui voulaient en savoir plus. Pour le voir, pour l’écouter. Jésus, pressé de toutes parts, se voit obligé donc de monter dans la barque de Pierre, accostée là, pour se mettre en face. On sait aussi que la voix porte mieux et plus loin sur l’eau. On ne sait pas ce que Jésus leur a dit ce jour-là. On ne sait pas non plus comment ces gens l’ont accueilli. Allaient-ils repartirent « vides » comme ces filets revenus vides de la pêche ?
3. Mais, continue Luc : « Ils capturèrent une telle quantité de poissons que leurs filets allaient se déchirer. » Sur la seule parole de Jésus qui ne connaît rien à ce métier, Simon et ses compagnons réussissent en plein jour ce que, eux, des pêcheurs de métier, n’ont pas réussi la nuit passée, au moment plus favorable pour la pêche. La nuit et le jour, des filets vides et prêts de se déchirer, tous ces traits antithétiques ne sont pas là par hasard. Ils portent un enseignement que l’on retrouvera à plusieurs reprises dans la bouche de Jésus. Il sera dans la parabole du semeur : si parmi les grains jetés sur la terre, beaucoup seront étouffés par des ronces, piétinés par les passants, mangés par les oiseaux, par contre ceux jetés en bonne terre produiront 30, 60 ou 100 pour un. Malgré sa petitesse, la plus petite de toutes, la graine de moutarde, donnera aux oiseaux de pouvoir y nicher. Malgré l’ivraie semée dans le champ de blé, la moisson se fera. La brebis perdue serait ramenée. La perle perdue serait retrouvée. Le trésor enfoui serait découvert. L’enfant prodigue reviendra. Lazare, de la mort, reviendra. Le Christ ressuscitera.
4. Mais à une condition. Que les grains soient semés, que cette femme recherche la perle perdue, que celui qui a trouvé le trésor enfoui dans un champ vende tout pour l’acquérir, que le berger aille à la recherche de sa brebis perdue, que ces lanceurs de filets deviennent des lanceurs de la Bonne Nouvelle et que la Parole soit proclamée. Le récit se termine justement par un appel à cette mission. Fi de la réticence de Simon à jeter les filets. Fi de l’indignité qu’il avance pour se tenir loin de ce maître-pêcheur. Fi de la retenue à l’entreprise de Zébédée qu’abandonnèrent Jacques et Jean, ses fils. Fi de toutes les réticences.
5. Pourtant toutes ces choix portent une singularité qui a quelque chose d’apparemment dramatique. Personne n’a vu et ne verra les filets débordants à se rompre, la perle retrouvée, le trésor découvert, le fils qui s’est éloigné de son père lui revenir. Mais il nous est demandé d’agir comme si ces attentes, nous les verrions comblées. Nous sommes dans situation de l’aveugle qui ne peut voir mais qui doit agir comme s’il voyait. S’il ne le fait pas, il ne trouve plus de sens à la vie. Son handicap le pousse à en sortir et devient sa force. Sous son insignifiante apparence, la graine trouve cachée la force de grandir, de fleurir, de produire. C’est bien ce qu’a compris l’apôtre Paul : « Quant à moi, je ne me vanterai que de ma faiblesse. » () On doit au psychiatre Boris Cyrulnik le concept de résilience dont il dit que c’est « l’art de naviguer dans les torrents ». Pour Jésus, c’est la force de naviguer à contre-courant. Ce qu’il vécut lui-même. Descendrons-nous de la barque alors que Jésus ne cesse d’inviter à y monter ? « Voulez-vous me quitter vous aussi ? » Vous n’êtes pas des moissonneurs mais des semeurs, avait-il dit à ses disciples. Paul, qui eut tant à endurer, écrit aux chrétiens de Rome : « Nous sommes fiers même de nos détresses, sachant que la détresse produit la persévérance, la persévérance, la fidélité éprouvée, et la fidélité éprouvée, l’espérance. » ()

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.
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