8e dimanche du temps ordinaire

1. A la suite du discours sur les béatitudes, Luc a rassemblé ici trois petites paraboles de bon sens et que personne ne peut contester. Qu’un aveugle ne puisse pas conduire un aveugle, qu’un arbre pourri ne peut pas porter de fruit, qu’on ne peut cueillir des figues sur des ronces, qu’il faut d’abord se corriger avant de vouloir corriger l’autre, autant de comportements qui vont de soi et que les sages de l’antiquité avaient déjà formulé depuis longtemps. Pourquoi Luc les met-il à la suite du discours des béatitudes ?

2. Il faut revenir un peu en arrière. Le discours « les béatitudes » et des engagements qui les suivent est rapporté par Matthieu et Luc. Mais pas dans les mêmes conditions. Pour Matthieu cela se passe à l’écart, sur une colline, en présence des disciples assis devant lui. Pour Luc il a lieu dans plaine avec, devant Jésus, « une grande foule de ses disciples et une grande foule du peuple de toute la Judée, de Jérusalem et du littoral de Tyr et de Sidon ». Pour Matthieu ce discours a l’allure d’une confidence à quelques proches. Luc, grec converti de la première heure, a une vision universaliste de l’évangile et ajoute, sous forme de paraboles, un enseignement pour tous ceux qui ont besoin d’une formation afin que chacun « soit comme son maître ».

3. Une formation à l’engagement. Tous les verbes utilisés le disent expressément. Guider, porter du fruit comme un bon arbre, enlever la poutre de son œil sont autant de comportements à prendre. Ce sont bien les actes qui comptent. Mais pas n’importe lesquels. Ne suivez pas n’importe qui. N’allez pas chercher là où vous ne trouverez rien. Ne vous mettez pas à donner des leçons aux autres mais commencez par vous corriger vous-mêmes. Le récit complet de ce passage de l’évangile de Luc se termine par une interrogation qui à les couleurs d’un attristement : « Pourquoi ne faites-vous pas ce que je vous dis ? »

4. Pour Jésus, il faut y mettre tout son cœur. Depuis toujours, le cœur est le symbole universel de l’amour conjugal, familial, de la générosité, du partage, de la franchise, du courage, et même de la passion. Pour Jésus, qui en emploie très souvent l’image, il est le symbole de là où Dieu se manifeste, là où on le rencontre, là où il doit être aimé. Bien au-delà de nos horizons. Ce lieu de rencontre, de dialogue est à trouver en soi. Les prières, les cérémonies cultuelles, les données de la foi sont toutes utiles mais trompeuses si nous sommes de ce peuple visé la sentence divine que rapporte le prophète Isaïe : « Ce peuple ne s’approche de moi qu’en paroles, ses lèvres seules me rendent gloire mais son cœur est loin de moi. » ().

Le message de Jésus à ses disciples est clair : « Soyez vrais ! Soyez vrais avec vous-mêmes, soyez vrais avec autrui, soyez vrais avec le Seigneur. » Cela pourrait se dire « Bas les masques » à l’approche du Carnaval qui en fait grand usage. Etre vrai avec soi-même, c’est d’abord se regarder, reconnaître qu’on n’est pas le meilleur. Etre vrai avec le prochain commence par se rappeler que nous avons bien du mal à suivre cette règle du Talmud : « Ne juge pas ton prochain avant de te trouver à sa place », tant nous sommes différents. Etre vrai avec le Seigneur, c’est lui demander sans cesse de nous aider à l’être, en paroles et en actes. Un saint italien du 16e siècle, Philippe Néri, pour qui la joie de vivre n’était pas un vain mot, disait aux jeunes qui accouraient vers lui : « Ne laissez passer aucun jour sans faire quelque bien. »


Méditation : Etre vrai

Seigneur,
Je la connais cette envie
Qui me dit à l’oreille
De me mettre en avant
Et dire à tout venant
Qu’il n’y a pas mon pareil.

Seigneur,
Je la connais cette jalousie
Qui me fait mettre la suspicion
Sur la réussite et les opinions
De qui ne partage pas mon avis.

Seigneur,
Je le connais ce silence
Qui me tient à distance
De la reconnaissance et du merci
A qui je dois bien plus que je ne dis.

Apprends-moi, Seigneur, les chemins
De l’humilité qui fait de la place
A celui que tu as mis à mes côtés
Pour me faire connaître la richesse
De ta création et la joie de partager
Le trésor qu’en nous tous tu as caché.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 02/03/2025