Pentecôte

1. La Pentecôte était, est toujours, une fête juive (Shavouot). Israël voulait, 50 jours après Pâques, remercier Dieu pour tous ses dons et plus particulièrement pour le don de la terre, le don de l’alliance, le don des promesses, le don de la Loi. En la commémorant, chaque Juif se retrouve en mémoire au pied du mont Sinaï. Une célébration du merci donc, une fête de la reconnaissance de l’attention permanente du Seigneur pour ceux qu’il avait choisis pour leur révéler toute la richesse de sa bienveillance.

2. L’évangéliste Luc, un païen grec converti, disciple de Paul, converti lui aussi, est le seul à nous raconter de manière imagée la Pentecôte vécue par les apôtres. Alors que Jésus était parti dans la plus grande discrétion, l’Esprit Saint, qui tient une grande place dans les Actes des apôtres, appelé aussi « évangile de l’Esprit Saint », se manifeste par le bruit d’un vent violent, des signes de feu, le don des langues. L’aspect merveilleux du récit ne doit pas nous étonner. Luc entend faire partager son enthousiasme et appeler à le suivre dur les chemins de la mission.

3. Dès les débuts, l’expansion de la foi chrétienne fut extraordinaire. Paul en fut le missionnaire le plus motivé. Il parcourut toutes les contrées qui aujourd’hui forment la Turquie, passa en Macédoine, se fixa un temps en Grèce et termina sa course à Rome où résidait déjà une communauté chrétienne, les catacombes en font foi. De nombreuses communautés chrétiennes virent très vite le jour à Alexandrie et au long du Nil, en Perse, en Ethiopie du fait que l’histoire de Jésus, son enseignement se transmirent rapidement par voie orale d’abord, puis très vite par écrit sur des papyri de fibre de bambou d’abord, sur des parchemins de cuir plus tard. Alors que le premier manuscrit complet juif de l’AT, qu’on ait entre nos mains, appelé le Codex de Saint-Pétersbourg, date de l’an 1000, deux manuscrits du NT, appelés Vaticanus et Sinaiticus, datent des années 350. On a trouvé même un petit fragment de l’évangile de Jean datant de l’an 125. On explique cette expansion extraordinaire par le contenu du message, universel et pacifique, et plus particulièrement par sa réponse à la question de ce qu’il adviendra de l’homme après la mort.

4. Qu’en est-il aujourd’hui ? On estime à 2,4 milliards le nombre de personnes se disant, à des degrés divers, de de culture chrétienne, devant l’islam (2 milliards), l’hindouisme comme l’irréligion (1 milliard), le bouddhisme (500 millions). Cependant dans les pays les plus avancés du point de vue technologique, au PIB élevé, la religiosité s’effondre. Si en Italie, Portugal, Autriche, Irlande, 80 % des personnes interrogées se disent de mouvance chrétienne, ils ne sont plus que 56 % en Belgique, Pays-Bas, Suède, Norvège. Beaucoup pensent que la science rend la foi inutile. D’autres ont remplacé la croyance dans le Dieu de la Bible par une croyance très personnelle en l’existence de pouvoirs ou de puissances supérieures, sorte de vague transcendance.

5. Devant ce constat et celui de nos églises qui se vident, le pape François nous renvoie : « Le problème n’est pas d’être peu nombreux mais d’être insignifiants. » Le cardinal de Malines-Bruxelles, Joseph De Kesel, pense que « l’Eglise va changer et sera plus humble, plus confessante et plus ouverte. » (Foi et religion dans une société moderne - Ed. Salvator). Il nous appartient de retrouver la dynamique que les signes du vent, du feu, du don des langues, ont inspirée aux Apôtres. Le vent violent qui ouvre les portes nous appelle de pas rester enfermés dans la crainte d’être montrés du doigt, ou figés dans positions de foi que nous avons apprises et qui ont évolué. Les langues de feu pour nous appeler à l’enthousiasme qui rend le cœur brûlant comme ceux des disciples d’Emmaüs après avoir retrouvé Jésus. Le don des langues pour signifier que nous ne devons pas nous taire. Toutes choses qui ont besoin de l’aide de l’Esprit Saint que le Père ne nous refusera pas si nous le lui demandons, comme nous y invite Jésus.

6. Depuis le 4e siècle, au temps de l’évêque de Milan, est attestée la prière de demande des sept dons de l’Esprit-Saint.

a. La Sagesse lorsque choses de la terre me font oublier la contemplation de l’amour de Dieu.
b. L’Intelligence lorsque je choisis le futile plutôt que l’essentiel.
c. La Science lorsque j’oublie de voir la beauté de Dieu dans sa création.
d. La Force de la persévérance lorsque je suis découragé par les épreuves.
e. Le Conseil lorsque je ne sais plus quoi faire et oublie de regarder plus haut et plus loin que moi.
f. La Piété lorsque, trop sûr de moi, j’oublie que l’humilité est le visage de la vérité.
g. La Crainte qui n’est pas la peur de Dieu mais le respect qui conduit à ne pas mettre Dieu au tribunal de nos récriminations.

Père, cet Esprit Saint, nous te le demandons en cette fête de Pentecôte 2022.

Méditation

En tes disciples confinés par la peur
De se voir entrer dans leur dernière heure,
Tu as rallumé la flamme qui danse de joie.
Seigneur, réveille le feu qui meurt en moi.

Le vent en a semé au loin les étincelles
Pour dire à ceux qui ont perdu l’espérance
Que la vie sur terre a du sens.
Seigneur, fais-moi lever yeux vers le ciel.

Tu leur as donné le don des langues
Pour franchir toutes les frontières
Que, depuis Babel, les hommes élevèrent.
Seigneur, aide-moi à ne pas me taire.

Mets-en-nous l’Esprit, qui des apôtres s’est emparé.
Que l’Intelligence et la Science des choses d’en haut
Nous donnent la Sagesse et la Force de la persévérance.
Par son Conseil fais nous enter dans la Contemplation
Avec la Piété comme notre prière agenouillée.