30e dim. ordinaire (26/10) : Pistes pour l’homélie
Piste 1
« Le mauvais pharisien et le bon pécheur. » Il serait facile à partir de ce titre, de rédiger une belle fable moralisatrice à la façon de La Fontaine. Mais nous passerions à côté du message de l’Evangile qui veut avant tout nous parler de Dieu. Nous pourrions paraphraser et dire : « Dis-moi quel est ton Dieu et je te dirai qui tu es. »
Voyons d’abord quel est le Dieu du pharisien ? Le pharisien est un homme exemplaire : couple bien uni, enfants bien élevés, il est pratiquant régulier, pour ce qui est de la morale il n’y a absolument rien à lui reprocher. Il se suffit à lui-même, à la limite il n’a même pas besoin de Dieu, d’ailleurs il se tient debout devant lui comme d’égal à égal. Il pourrait même se passer de lui, il n’en n’a besoin que pour obtenir la récompense méritée.
Bien loin derrière lui se tient le publicain. Il est loin d’être un saint : collaborateur de l’occupant romain, probablement couple déchiré, morale sexuelle dévoyée, dealer fricotant dans des affaires peu reluisantes. Avec un sans gêne incroyable il ose entrer dans le temple. Oui il entre dans le temple mais en se frappant la poitrine : « Mon Dieu je ne suis pas digne. »
Quel est donc son Dieu ? Un Dieu de pitié et de pardon. Un Dieu toujours prêt à relever celui qui est tombé, à accueillir celui qui est perdu.
Par cette parabole, Jésus nous dit que son Dieu est le Dieu du publicain.
Mais si la parabole nous parle essentiellement de Dieu, elle nous parle aussi de nous. Spontanément en écoutant la parabole, nous essayons de nous identifier à l’un de ces deux personnages.
Dans lequel nous retrouvons-nous ? Ce qui est certain c’est que nous nous retrouvons dans les deux. « Je te rends grâce de ne pas être comme le reste des hommes », dit le pharisien.
N’est-ce pas ce que nous pensons au fond de nous-mêmes, sans naturellement le dire tout haut ? Nous nous situons spontanément dans le camp des « bons ». Remarquez que dans les conflits, chacun se considère dans le parti des bons tandis que les autres sont les mauvais. Nous pensons volontiers que si tous les autres pensaient, agissaient comme nous, le monde irait beaucoup mieux. Instinctivement nous nous prenons volontiers pour la référence, c’est nous qui avons le bon goût, le jugement juste et le comportement correct. Si le malheur arrive, il vient toujours des autres ! Quelle manie de nous croire toujours meilleurs que les autres.
Pourtant il y a en nous à la fois cette suffisance ambitieuse qui cache une volonté de nous passer des autres, mais à la fois aussi cette conscience de notre faiblesse et de notre fragilité. Nous pourrions répondre comme Jeanne d’Arc à qui ses juges demandaient perfidement si elle était en état de grâce ; elle répondait malicieusement qu’elle n’en savait rien : « Si je n’y suis que Dieu m’y mette, si j’y suis qu’il m’y garde. »
Cette parabole finalement nous apprend deux choses : Dieu préfère l’humilité du pécheur à l’orgueil de celui qui se croit juste. Mais aussi que Dieu ne nous change pas malgré nous. En effet lorsque tous deux ont quitté le temple, le publicain ne savait pas qu’il était devenu juste, il est probablement sorti cafardeux comme il était rentré et le pharisien qui s’était encensé est probablement sorti conforté dans sa conviction de sainteté.
La conclusion est plutôt une invitation à nous placer résolument sous le regard de Dieu. Qu’il nous fasse prendre conscience de notre faiblesse et de notre grandeur et qu’il nous garde dans l’humilité et la pauvreté qui sont les siennes.
Piste 2
Vous le savez déjà, même au risque de vous lasser, j’aime redire et répéter que l’Evangile n’est pas un livre qui nous raconte l’histoire de Jésus, encore moins un recueil de morale qui nous dit ce qu’il faut faire et comment se conduire. L’Evangile est avant tout un livre qui nous parle de Dieu, nous dévoile le Dieu de Jésus Christ.
Ainsi cette parabole nous dit ce que Dieu n’est pas : le Dieu des pharisiens et ce qu’il est : le Dieu des publicains.
Regardons d’abord quelle image le pharisien nous brosse-t-il de Dieu ? Il est un Dieu super législateur, qui édicte ses lois auxquelles il faut obéir.
Qu’est-ce qu’il attend de ce Dieu ? Rien, sinon une récompense pour ses mérites. Toute son assurance, le pharisien la trouve dans la pratique et son bon droit. A la limite il n’a pas besoin d’un Dieu qui soit bon, il lui suffit d’être juste et équitable pour punir et récompenser à bon escient.
Toute sa prière va d’ailleurs dans ce sens. S’il prie c’est pour se mettre au centre lui-même. Sa prière commence par « je », un « je » qui revient 4 fois sur trois lignes : « je te rends grâce » « je ne suis pas comme le reste des hommes » « je jeûne 2 fois par semaine » « je verse le dixième de mes biens ».
En fait il occulte Dieu par son énorme « JE ».
Sa prière est d’autre part un simple monologue qui n’attend pas de réponse. Dieu n’y a d’autre rôle que de l’applaudir. Le pharisien se suffit à lui-même, il n’a pas besoin de se convertir, il n’attend rien de Dieu qui ne pourrait donc rien lui donner, il attend encore moins des hommes.
Si nous regardons maintenant le Dieu du publicain, c’est un Dieu de tendresse et de miséricorde. Un Dieu avec qui on peut rentrer en relation, il est toujours prêt à pardonner parce qu’il nous aime tels que nous sommes.
En face de ce Dieu le publicain a pu introduire son « je » mais à la bonne place, c’est-à-dire à la dernière : « Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis. »
Maintenant nous pouvons aussi choisir en quelque sorte quel sera notre Dieu. L’Eglise a souvent été tentée de choisir le Dieu du pharisien c’est-à-dire un Dieu qui aime l’ordre, le respect des règles et de la morale.
Mais si Dieu aime l’ordre et la bonne morale avant tout il aime l’homme qu’il fera passer avant les règles, les règles que les hommes se sont souvent donné eux-mêmes. Or nous savons à quoi cela mène d’obéir aux ordres aveuglément. Lors du procès de Nuremberg, les tortionnaires allemands déclaraient pour s’excuser : « nous n’avons fait qu’obéir aux ordres » ou encore les Houtous du Rwanda qui devant les charniers de Tutsis déclaraient « nous n’avons fait qu’obéir aux ordres ».
Le Dieu de Jésus Christ, le Dieu de la Bible nous demande comme nous l’avons vu aussi dans la première lecture : de désobéir aux lois qui « défavorisent le pauvre et l’opprimé ou quand elles méprisent la supplication de l’orphelin et la plainte de la veuve ».
On ne saurait faire ici la recension de toutes ces lois, surtout dans le domaine économique, qui ont pour résultat de faire en sorte que les chats et les chiens de chez nous ont une sécurité d’existence plus grande que les pauvres d’ici et d’ailleurs.
Si nous nous disons disciples du Dieu que Jésus nous révèle, nous avons une mission exaltante devant nous, celle d’annoncer un Dieu libérateur des pauvres et de faire de notre Eglise un lieu de vérité et de liberté, un lieu de justice et de paix afin que tout homme puisse y trouver un havre de réconfort et… des raisons de continuer à espérer en un monde meilleur.

Prêtre du diocèse de Namur, † 2017.
- 26e dim. ordinaire (28/9) : Un Credo
- 29e dim. ordinaire (19/10) : Prière eucharistique « Prière et mission »
- 25e dim. ordinaire (21/9) : Un Credo
- 25e dim. ordinaire (21/9) : Prières pour la célébration
- 27e dim. ordinaire (5/10) : Prières pour la célébration
- 27e dim. ordinaire (5/10) : Pistes pour l’homélie
- 27e dim. ordinaire (5/10) : Prière eucharistique « La foi… la vie ! »
- 29e dim. ordinaire (19/10) : Pistes pour l’homélie
- 30e dim. ordinaire (26/10) : Prière eucharistique « Dieu des humbles »
- 26e dim. ordinaire (28/9) : Prières pour la célébration
- 26e dim. ordinaire (28/9) : Prière eucharistique « Père des pauvres »
- 30e dim. ordinaire (26/10) : Un Credo
- 28e dim. ordinaire (12/10) : Prières pour la célébration
- 29e dim. ordinaire (19/10) : Un Credo
- 25e dim. ordinaire (21/9) : Pistes pour l’homélie
- 30e dim. ordinaire (26/10) : Prières pour la célébration
- 28e dim. ordinaire (12/10) : Un Credo
- 27e dim. ordinaire (5/10) : Un Credo
- 26e dim. ordinaire (28/9) : Pistes pour l’homélie
- 30e dim. ordinaire (26/10) : Pistes pour l’homélie
- 25e dim. ordinaire (21/9) : Prière eucharistique « L’argent trompeur »
- 28e dim. ordinaire (12/10) : Prière eucharistique « Reconnaissance »
- 29e dim. ordinaire (19/10) : Prières pour la célébration
- 28e dim. ordinaire (12/10) : Pistes pour l’homélie