L’Église que j’espère

J’aime mon Église, je crois fermement que, fondée sur la pierre angulaire qu’est le Christ, elle a les promesses de la vie. Je suis témoin que l’Esprit agit en elle et y produit, aujourd’hui, des fruits incomparables de sainteté, mais je souffre de la voir engluée dans une foule de problèmes secondaires qui ruinent la crédibilité de son message et en masquent la beauté novatrice.

Je ne peux plus prier pour les vocations comme on me demande avec insistance de le faire. Je prie pour que l’Église ait le courage de prendre les orientations qui répondent à la situation et correspondent aux appels de l’Esprit. Ce qu’on appelle la crise des vocations n’est pas conjoncturelle ; en se prolongeant, elle nous invite à une réflexion plus large sur l’Église et les ministères, elle nous appelle à cesser de regarder vers un passé récent à restaurer pour nous tourner vers l’avenir. Si cette crise cessait miraculeusement, nous n’aurions rien de plus pressé que de revenir à l’Église de Pie XII, les prêtres reprendraient toutes les responsabilités que les laïcs commencent à assumer et nous redeviendrions une Église cléricale, or c’est à une Église communion de baptisés responsables que l’Esprit nous appelle.

Nous sommes appelés à rompre avec une tradition cléricale qui n’a cessé de s’imposer depuis le Ve siècle, mais qui n’est pas évangélique. Le Christ n’a pas confié l’avenir de sa communauté à une classe d’hommes qui en assumeraient seuls l’animation et les orientations ; or c’est ce qui s’est produit à travers l’instauration d’un clergé conçu sur le mode des celui des cultes païens. C’est avec cette tradition qu’il faut rompre en rendant aux communautés chrétiennes la responsabilité de leur vie et de leur animation sous le contrôle du ministère apostolique des évêques.

C’est possible sans rupture, en retrouvant la tradition des premiers siècles :

 Il faut rendre aux communautés chrétiennes la responsabilité de la célébration de l’eucharistie. Une communauté chrétienne doit pouvoir célébrer l’eucharistie pour nourrir sa vie théologale, sans avoir besoin de recourir à un célébrant extérieur. Elle doit proposer à l’évêque les noms de ceux qu’elle souhaiterait voir présider ses célébrations et tout ensuite doit se faire sous le contrôle et avec la bénédiction de l’évêque.

 Il faut rendre à ces communautés la responsabilité de l’organisation des ministères dont elles ont besoin : réconciliation, souci des malades, préparations des sacrements (baptême et mariage célébrés par l’évêque ou ses collaborateurs directs).

 Les diocèses peuvent être plus petits, l’évêque résidant au centre, entouré de quelques collaborateurs prêtres vivant en communauté avec lui et partageant sa mission.

 Si une communauté chrétienne entreprend sous sa responsabilité une œuvre d’assistance, en suppléance à ce que la société ne fait pas, la responsabilité pourra en être confiée à un diacre (exemple : la diaconie de Toulon).

Au sujet de l’œcuménisme. Depuis un siècle de grands efforts ont été faits, qui aujourd’hui plafonnent. On a cherché à progresser vers l’unité en éliminant peu à peu les points de désaccord. Il semblerait qu’il faille aujourd’hui trouver une autre manière de progresser. Le Christ veut l’unité ; cette unité, elle existe déjà dans bien des cœurs. Pourquoi alors ne pas inverser la méthode : poser des gestes d’unité (intercommunion, confession commune de Jésus-Christ, réconciliation) et à partir de là (de l’unité vécue) aborder les différences. C’est un peu le chemin qu’a vécu Taizé et il y a là un exemple.

Dans son rapport au monde, l’Église a un message de bonheur et de salut pour tous les hommes. C’est ce message qu’il faut annoncer en faisant confiance à la conscience des hommes et des communautés pour le vivre le mieux possible.

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Michel RONDET s.j.
Publié: 01/01/2019