20e dimanche ordinaire

1. L’épisode est surprenant. Hors du territoire juif, dans le pays des Cananéens que les Juifs appelaient celui des « chiens », une femme, une païenne vient demander, à grands cris, la guérison de sa fille. Au point d’agacer les disciples : « Renvoie-la, car elle nous poursuit de ses cris », ce que Jésus refuse. Il refuse avec des mots inattendus de sa part : « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël. » Alors qu’il est là dans le pays des païens ! Cette femme insiste et s’entend répondre : « Il n’est pas bon de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens ! » Mais elle persiste : « Oui, Seigneur, mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres ! » Ce qui provoque l’admiration de Jésus : « Femme, grande est ta foi, que tout se passe pour toi comme tu le veux. »

2. Cet épisode rappelle celui de cet homme venu demander du pain à son voisin qui ne veut pas être dérangé au milieu de la nuit. Son insistance finit par l’obtenir. Jésus conclut alors : « Eh bien, moi je vous dis : demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, et à qui frappe on ouvrira. » Cette Cananéenne est à la porte et veut qu’on lui ouvre. Elle ne fait pas sa demande du bout des lèvres. Elle met toute son énergie, tout son cœur dans la cause de sa fille. Elle ne se laisse pas rebuter par ce qui semble un refus et avec humour elle réitère sa prière, se jette aux pieds de Jésus. Il ne fut ni sourd à sa prière, ni insensible à sa peine. Mais il laissa le temps à cette femme de faire monter en elle la confiance.

3. L’efficacité de la prière a toujours interrogé les croyants. Job, cette figure du juste de la tradition juive, n’a cessé de se plaindre et mettre Dieu en jugement parce qu’il avait perdu tout ce qui faisait son bonheur : biens, enfants, santé. Des chrétiens déçus abandonnent. « Pourquoi moi ? » est une question qui enferme. Cette Cananéenne a prié, non pas pour elle, mais pour sa fille, tout comme cet homme de la parabole pour donner du pain à son ami arrivé à l’improviste. Nous sommes invités à regarder plus loin que nous, autour de nous. La solidarité s’apprend dans la communion de sentiments et de comportements tout particulièrement dans les moments difficiles vécus tout autour de nous. Plus de 40 versets des écrits évangéliques et apostoliques détaillent tous les comportements à mettre en œuvre pour vivre le commandement phare de Jésus : « Aimez-vous les uns les autres. » Le temps de la prière est un temps de prise de conscience de notre devoir de solidarité. Les événements souvent nous dépassent et nous ignorons où ils nous conduiront. Le Christ n’a pas choisi la souffrance mais il a compris qu’il faisait la volonté de son Père en acceptant de montrer jusqu’où l’amour pouvait aller. Le Père dominicain Garrigou-Lagrange eut cette belle formule : « Il faut désirer ce que Dieu veut pour nous comme il le veut. »

4. L’auteur Saint-Exupéry a écrit : « La grandeur de la prière réside d’abord en ce qu’il n’y est point répondu… Ce qui importe, ce n’est pas d’arriver mais d’aller vers. » Il veut signifier que ce qui importe, ce n’est pas d’obtenir mais de continuer le dialogue avec le Seigneur. Il nous permet d’échapper au silence que risque de produire la satisfaction de la prière exaucée. La prière comprise ainsi est de l’Espérance en marche vers un futur qui ne finit pas de nous attirer et qui permet d’avancer sans se décourager.


Prière de saint Thomas d’Aquin (1225-1274)

Accordez-moi, Dieu miséricordieux, de désirer ardemment ce qui vous plaît, de le rechercher prudemment, de le reconnaître véritablement et de l’accomplir parfaitement, à la louange et à la gloire de votre nom. Mettez de l’ordre en ma vie, accordez-moi de savoir ce que vous voulez que je fasse, donnez-moi de l’accomplir comme il faut.
Que j’aille vers vous, Seigneur, par un chemin sûr, droit, agréable et menant au terme, qui ne s’égare pas entre les prospérités et les adversités, tellement que je vous rende grâce dans les prospérités, et que je garde la patience dans les adversités, ne me laissant ni exalter par les premières, ni déprimer par les secondes.
Accordez-moi, Seigneur mon Dieu, une intelligence qui vous connaisse, un empressement qui vous cherche, une sagesse qui vous trouve, une vie qui vous plaise, une persévérance qui vous attende avec confiance, et une confiance qui vous embrasse à la fin.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 20/08/2023