Centrafrique, en avril 2014

Extraits du discours de Nestor NONGO à l’occation du 55e anniversaire du décès du président Boganda, fondateur de la République Centrafricaine

Après l’enlèvement puis la "récupération" de Nestor NONGO et des trois prêtres qui étaient avec lui, voici des nouvelles : l’abbé Forman WILIBONA du diocèse de Bossangoa, curé de la Paroisse de Paoua, vient d’être assassiné par les Mbororos à Ouham bac à 40 kilomètres de Bossangoa alors qu’il rentrait de la messe chrismale. Son évêque Nestor NONGO, se trouve toujours coincé avec les trois prêtres à Batangafo où les séléka ont tiré sur leur voiture. La Passion du Seigneur se poursuit en son corps, à travers ses membres. Mais la Vie a vaincu. Bonne fête de Pâques.
Louis FROMY, s.m.a.

Volonté de partition du pays

« … L’exode massif des étrangers de Centrafrique lors de cette crise jette un discrédit sur tout le peuple centrafricain. Toutefois il convient de rétablir la vérité quant à ces départs organisés et financés par l’Organisation Mondiale des Migrants. Est-il juste de les présenter systématiquement comme une agression contre la minorité musulmane ? Certains témoignages recueillis sur le terrain nous permettent d’en douter. Ils répondent bien au contraire à une volonté politique de concrétiser la partition du pays ou l’érection d’un protectorat dans le nord selon certaines rumeurs.

Nous sommes en Centrafrique où les rumeurs se vérifient presque toujours. Donc il convient de les prendre très au sérieux. Les violences auxquelles nous assistons avec impuissance ne sont pas l’apanage d’une seule communauté. De part et d’autre, certains individus refusent malheureusement de s’inscrire dans la logique de la paix, du pardon, de la réconciliation et privilégient le chaos. La faillite de l’Etat face aux groupes armés qui commettent des exactions sur les populations civiles et l’impunité ont mis à mal la cohésion sociale.

Des poudrières non désarmées

En ce sens, le véritable problème auxquelles pays fait face est celui de l’insécurité. C’est ce qui explique en partie que les camps de fortune dresses pour les déplacés ne se vident pas encore. Beaucoup de personnes qui y trouvent refuge sont parfois à quelques centaines de mètres de leurs maisons, mais ne se sentent pas en sécurité pour y retourner. En effet comment expliquer par exemple que certains quartiers de Bangui ont fait l’objet de désarmement à plusieurs reprises alors que d’autres, connus pour être des poudrières, ne l’ont jamais été ? On a même le sentiment que ces derniers sont protégés par les forces internationales.

On entretient des rancœurs

Si tel est effectivement le cas, on entretient des rancœurs qui ne favoriseront guère la cohésion sociale que nous recherchons tant. Par ailleurs il se pose la question de la souveraineté de notre Nation. Comment, sous prétexte d’escorter en toute sécurité leurs concitoyens, les forces armées tchadiennes traversent en armes nos frontières nationales et commettent les pires exactions sur nos populations civiles, tuant en passant des victimes innocentes et brulant des maisons, sans que ces forfaits ne suscitent une quelconque protestation de la part de nos dirigeants et de nos gouvernants ? Jusqu’à quand allons-nous reposer la sécurité de notre Nation sur les forces étrangères, aussi professionnelles soient-elles ? Il serait temps d’associer nos forces armées centrafricaines au laborieux travail qui se fait et que nous apprécions. Dans d’autres pays tels que le Mali, la RDC, la Côte d’Ivoire, les forces internationales sont soutenues par l’armée nationale.

Pourquoi la République Centrafricaine ferait-elle exception ? Par ailleurs la commémoration du décès de Barthelemy BOGANDA nous rappelle la feuille de route qu’il nous a tracée. Qu’en est-il ? Le constat est plutôt décevant. « Il n’y a aucun signe de progrès. Le respect de l’homme dans son intégrité physique et dans la protection de ses biens n’est plus garanti. Tuer devient un acte banal et anodin. Nous plongeons dans la “culture de la violence et de la mort”.

La véritable bataille est celle du développement

Ne nous leurrons surtout pas. Les violences fratricides nous fragilisent. Elles limitent sinon détruisent l’impact des investissements qui ont été consentis pour le développement de notre pays. Opter pour la violence et l’autodestruction, c’est se tromper de combat. L’essentiel est ailleurs. La véritable bataille est celle du développement, de la relance économique et de la lutte contre la pauvreté, la misère et l’impunité. Les défis a relever sont énormes dans les domaines de l’enseignement, de la sante, de l’habitat, de l’alimentation, de la protection, de la sécurité et des infrastructures diverses ». C’est uniquement par le travail, la justice et la réconciliation que nous émergerons des grandes détresses dans lesquelles le pays est plonge.

Fidèles à notre devise, promouvons les valeurs de la fraternité pour une Centrafrique unie, forte et indivise. Vive la République centrafricaine ! »

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Nestor-Désiré NONGO AZIAGBIA s.m.a.

Évêque de Bossangoa.

Publié: 01/05/2014