Loi morale et lois civiles

 De quoi parlons-nous ? Précisions de vocabulaire et actualité du débat
 Quels sont les questions en jeu ?
 Quelques repères et points d’attention proposés par l’Eglise catholique

1) De quoi parlons-nous ?

 Lois civiles : On ne les opposera pas ici aux lois pénales, mais à une loi morale universelle, immuable et non écrite. Les lois civiles recouvrent dans ces lignes ce que l’on appelle le droit positif, c’est-à-dire tout le dispositif juridique - législatif et réglementaire - qui est celui d’un pays donné à un moment donné. Les lois civiles définissent le permis et le défendu, en vue de rendre possible un vivre-ensemble dans une société pluraliste.
 Loi morale : Au singulier, il s’agit de l’impératif qui interdit à l’homme certains comportements, non pas pour le seul motif que ces comportements seraient sanctionnés par le droit, mais parce qu’ils sont indignes de l’homme. Située bien en amont des lois civiles, la loi morale définit le bien et le mal, en commandant de faire le premier et de rejeter le second. Elle est universelle, immuable et transcende toutes les expressions écrites qui peuvent chercher à l’exprimer (règles déontologiques, avis des divers comités d’éthique, etc.). C’est, pour les juifs et les chrétiens, le registre du Décalogue et, pour beaucoup de nos contemporains, celui des Droits de l’Homme.

Entendue ainsi, "elle déborde de loin les limites de la loi civile. C’est elle qui juge la loi civile et non l’inverse. " [1]

Qu’un écart puisse exister de fait entre la loi morale et les lois civiles, notre tradition chrétienne le sait depuis longtemps et l’apôtre Pierre notait déjà qu’en cas de conflit entre les deux autorités, "il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes" (). C’est aussi ce qui explique en partie l’âpreté des débats récents ou actuels autour du pacte civil de solidarité (PACS), de l’interruption volontaire de grossesse et des centres de consultation pré-IVG tenus par l’Eglise catholique en Allemagne, de l’euthanasie, des recherches et expérimentations médicales sur l’embryon, de la gestion des flux migratoires ou encore d’un rappel de la torture pratiquée par l’armée française en Algérie.

Explicitons brièvement, pour chacune de ces questions, ce qui fait problème...

- Le PACS : pour remédier à la situation aussi précaire qu’injuste dans laquelle pouvait se retrouver un concubin à la mort de son compagnon, fallait-il donner un statut social au "couple" formé par deux personnes homosexuelles ? N’était-ce pas suggérer que l’homosexualité n’était qu’un mode comme un autre d’exercice de la sexualité, au même titre que l’hétérosexualité ? N’est-ce pas gommer le côté fondateur de la différence sexuelle et porter un coup - symboliquement très fort et dont on n’a pas encore mesuré toutes les conséquences ! - à l’institution familiale ? D’un côté la loi morale qui veille au respect des grandes différences qui structurent notre humanité (notamment la différence des sexes) ; de l’autre des exigences de solidarité et de justice pour des citoyens plongés dans la précarité par le décès de leur plus proche compagnon...

- L’IVG : pour remédier au drame médical et humain des avortements clandestins, fallait-il encadrer légalement cette pratique de l’avortement que la morale réprouve ? Si oui, comment faire pour que ce qui était considéré par la loi de 1975 comme une exception et une tolérance ne devienne pas, chez beaucoup aujourd’hui, un droit réclamé ? D’un côté la loi morale qui condamne l’avortement ; de l’autre le législateur aux prises avec l’avortement clandestin et des femmes en situation de détresse...

- L’euthanasie : d’un côté la loi morale qui interdit le meurtre ; de l’autre la nécessité pour la société de se prononcer face aux revendications de divers groupes de pression comme l’ADMD (Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité) et, d’une manière générale, face au désir bien légitime de nos contemporains d’éviter à ceux qu’on aime d’insupportables souffrances et une fin de vie jugée indigne...

- Les recherches et expérimentations médicales sur l’embryon : d’un côté la loi morale qui commande de traiter un être humain toujours comme une fin, jamais comme un moyen, et donc qui interdit de réduire un embryon à n’être qu’un amas de cellules ou matériau de laboratoire [2] ; de l’autre le légitime et très fort désir de l’opinion publique de voir progresser la recherche médicale, avec la pression des chercheurs et des grands groupes pharmaceutiques...

- La gestion des flux migratoires : d’un côté la loi morale qui affirme que la terre est à tous et donc que "les nations mieux pourvues sont tenues d’accueillir autant que faire se peut l’étranger en quête de sécurité et des ressources vitales qu’il ne peut trouver dans son pays d’origine " [3] ; de l’autre les lois et règlements que sont amenés à prendre les responsables politiques d’un pays qui "ne peut pas accueillir toute la misère du monde" !

- Le rappel de la torture pratiquée par l’armée française en Algérie, cruel rappel d’une période plus cruelle encore : d’un côté la loi morale qui rappelle à la fois que la fin ne justifie jamais les moyens [4] et que le devoir d’obéissance envers les autorités a des limites [5] ; de l’autre un engrenage de la violence et la valorisation de l’obéissance dans une structure aussi hiérarchique que l’armée...

L’objet de cet article est donc la gestion de l’écart qui existe, pour chaque citoyen, entre la loi morale et les lois civiles de son pays, entre les normes morales qu’il reçoit ou qu’il se donne et l’état actuel de la législation de son pays.
"Dans une société pluraliste, il arrive que la loi se contente de traduire, un consensus des citoyens au niveau le plus bas, c’est-à-dire des moindres exigences, par exemple en matière de solidarité et de politique familiale. Il arrive même que la loi civile, par faiblesse devant une opinion publique déformée, légalise des pratiques illicites complètement opposées aux Droits de l’homme, comme l’apartheid ou l’avortement." (...) [6]
"Ainsi, ce qui est légal n’est pas toujours moral. Le chrétien ne peut se résoudre à voir en désaccord légalité et moralité. C’est pourquoi le concile Vatican II demande aux laïcs, d’une part de travailler à ce que les lois civiles soient conformes à la loi morale [7], d’autre part d’obéir aux lois justes, car elles obligent en conscience [8]." [9]

2) Les questions en jeu

Certaines sont très générales et concernent tous les citoyens, croyants ou non ; d’autres sont plus spécifiques aux chrétiens et aux catholiques en particulier.

2.1) Quelques questions de fond

 2.1.1 : Quel est le fondement et l’autorité des lois civiles et, plus encore, de la loi morale ou des valeurs auxquelles on se réfère ? Ainsi par exemple : à qui la vie d’un homme appartient-elle ? Et la dignité de la vie humaine que postule la déclaration des Droits de l’Homme, d’où lui vient-elle ? Qui en est juge et sur quels critères ?
 2.1.2 : Quel est le rôle de la loi civile et donc du législateur dans une société pluraliste comme la nôtre ?
 2.1.3 : Comment éviter la guerre des valeurs dans nos démocraties ? ("pro-life" contre "pro-choice " aux U.S.A.)
 2.1.4 : Dans cette tension entre loi morale et lois civiles, qu’en advient-il des minorités ? Quel est le fondement et le champ d’application possible du principe de l’objection de conscience ? Y a-t-il un droit, voire un devoir, de désobéissance civile ?

2.2 : Quelques questions internes à l’Eglise

 2.2.1 : Les catholiques doivent-ils imposer aux autres citoyens leur morale ?
 2.2.2 : Jusqu’où va le devoir d’obéissance des catholiques envers les autorités légitimes ?
 2.2.3 : Quelle est l’obéissance due par les catholiques au magistère du pape et des évêques sur ces questions qui divisent la société et, parfois, l’Eglise elle- même ?
 2.2.4 : Peut-il y avoir des stratégies différentes, entre catholiques, pour gérer l’écart qui existe entre les impératifs de la loi morale et leur traduction dans les lois civiles ?

3) Quelques repères et points d’attention proposés par l’Eglise catholique

Essayons de reprendre, une à une, les questions de fond que nous venons de mentionner et, pour chacune d’elles, de rappeler brièvement l’enseignement de notre Eglise.

3.1 : Le fondement et l’autorité des lois civiles et, plus encore, de la loi morale ou des valeurs auxquelles on se réfère

Selon l’Eglise catholique, interprétant la réflexion paulinienne à ce sujet ( ;  ; ), c’est de Dieu, en dernier recours et à certaines conditions, que la loi civile positive tient son autorité. Dans le dialogue avec des non-croyants, on dira que les lois civiles tiennent leur légitimité de leur conformité à la loi morale et, plus précisément, du bien commun qu’elles visent en permettant un vivre-ensemble dans nos sociétés pluralistes et en acceptant de jouer un rôle dans la formation des consciences.

Pour la tradition catholique, la loi morale est plus directement encore référée à Dieu, à la fois Créateur de l’homme (et donc capable de lui parler dans le secret de sa conscience) et son Rédempteur (éclairant sa conscience par le contenu objectif de la Révélation). Cette transcendance reconnue à la loi morale est le garant de son intangibilité, de sa pérennité et de son universalité. C’est parce que, en dernier recours, Dieu seul est le maître de la vie de son commencement à son terme que personne en aucune circonstance ne peut revendiquer pour soi le droit de détruire directement un être humain innocent [10]. C’est parce que la dignité de tout homme vient d’avoir été créé à l’image et comme à la ressemblance de Dieu [11] que nul ne peut perdre ou se voir dénier cette dignité.

Mais la question du fondement de la loi morale - ou même de sa simple existence ! - devient insoluble dès lors qu’on refuse toute transcendance, ainsi que le font nos sociétés démocratiques, pluralistes et utilitaristes. Tentées de se faire une morale à leur image [12], elles exaltent la vertu de tolérance pour ne plus avoir à se confronter aux concepts de vérité ou d’absolu, et avec pour seule prétention l’élaboration des quelques indispensables repères éthiques, consensuels et provisoires, nécessaires à la coexistence pacifique des citoyens. Cette "éthique procédurale", tant vantée par John Rawls [13] et Jürgen Habermas [14], peut néanmoins conduire à de singuliers glissements totalitaires. Qui ne voit en effet la fragilité d’un concept comme celui de "dignité humaine", s’il n’existe plus d’absolu moral et si, par exemple, le seuil d’humanité, à l’orée d’une existence ou à son achèvement, ne dépend plus que des prescriptions de la loi positive, variable d’une société à l’autre ?

3.2 : Le rôle de la loi civile et donc du législateur dans une société pluraliste

Le législateur n’a-t-il qu’à suivre l’évolution des mœurs et déclarer légale toute pratique tendant à devenir majoritaire ? Ou bien doit-il se refuser de confondre l’impératif avec l’indicatif, le droit avec les faits, et admettre que les lois qu’il adopte "jouent un rôle de grande importance et parfois déterminant dans la formation des mentalités et des habitudes" [15] et qu’il a donc une responsabilité éducative vis-à-vis de la société qui est la sienne ?

L’Eglise penche plutôt pour cette seconde conception, plus ambitieuse, de la loi, laquelle en effet n’a pas seulement à interdire toute pratique contraire au bien commun, mais doit aussi se soucier, en positif, de promouvoir certaines valeurs [16].

Bien sûr, il ne s’agit pas d’attendre des lois positives qu’elles établissent un "ordre moral". Le droit vise d’ailleurs simplement à la coexistence aussi harmonieuse que possible des libertés et n’a pas à se prononcer sur le sens de la vie. Mais on peut tout de même attendre de lui une certaine cohérence. La difficulté vient de ce que, dans nos sociétés où domine le pluralisme religieux, éthique et politique, il n’est plus possible de faire comme si le droit devait se conformer à une morale largement partagée, puisque c’est précisément ce consensus qui fait problème !

Il existe donc des échelons intermédiaires entre ce que la loi doit directement exiger et ce qu’elle doit se contenter de promouvoir, entre ce qu’elle interdira et ce qu’elle laissera au jugement des consciences :
 La loi doit proscrire - et donc réprimer et sanctionner pénalement - toute atteinte directe à la dignité des personnes ou à quelque droit humain inaliénable. à défaut de pouvoir être fondée théologiquement ou même philosophiquement, cette foi en la dignité de tout homme est en effet posée comme un postulat nécessaire dans les Déclarations des Droits de l’homme auxquelles nos Etats ont souscrit solennellement, et constitue en quelque sorte la base morale de nos système sociaux, la valeur fondamentale hors de laquelle nos sociétés vacillent sur leurs bases.
À titre d’exemples, on peut donc dire que la loi devra toujours fermement proscrire et sanctionner des pratiques telles que la torture, le proxénétisme, la discrimination raciale ou le clonage humain.
 La loi doit encadrer de façon stricte des pratiques qui pourraient conduire à de telles atteintes alors que, par d’autres aspects, elles sont bénéfiques (par exemple, les dons d’organes qui, dès que l’argent s’en mêle, peuvent donner lieu à d’odieux trafics, dont les victimes seront les populations pauvres de pays en voie de développement, contraintes de vendre telle ou telle partie de leur corps pour survivre !)
 La loi doit parfois, pour le bien de l’ordre public, tolérer ce qu’elle ne peut interdire sans qu’en découle un dommage plus grand pour la société [17]. Mais en ce cas, il faudra prendre garde à ce que de telles zones de tolérance ne soient interprétées ni comme résultant d’un droit, et veiller à ce qu’elles n’en viennent pas à une extension abusive. De telles pratiques ne doivent faire l’objet d’aucun encouragement portant atteinte à la moralité publique (publicité commerciale interdite, intérêts économiques strictement contrôlés). Enfin, il importe qu’une telle loi soit toujours accompagnée de mesures positives remédiant aux causes du mal que l’on ne peut réprimer directement. Les exemples les plus connus sont peut-être l’ancienne loi sur le statut de l’objection de conscience, l’autorisation de vendre librement des seringues en pharmacie malgré l’encouragement que cela peut constituer pour ce fléau qu’est la toxicomanie, et encore la célèbre "loi Veil" de 1975, tolérant quelques exceptions au principe général posé à l’article 1er de cette loi.

3.3 : Comment éviter la guerre des valeurs dans nos démocraties ?

Contentons-nous ici de deux observations.

3.3.1 De l’intérêt d’impératifs moraux indépendants des sondages d’opinion...

Le langage des valeurs est caractéristique de nos démocraties et du climat libéral et individualiste qui y règne. Il suppose en effet un individu qui, source libre et souveraine de toutes les obligations qu’il saurait contracter, détermine lui-même les valeurs auxquelles il consent à confronter ses désirs et comportements. Un tel langage, récusant l’objectivité d’une loi transcendante à l’homme, tend à enfermer les groupes et les individus dans leurs particularisme, chacun établissant sa propre hiérarchie des valeurs au nom desquelles il est prêt à descendre dans la rue. Difficile donc d’échapper à l’affrontement valeur contre valeur [18], ce que Max Weber appelait "la guerre des dieux" !

En cas de conflit de valeurs, allons-nous devoir déterminer par vote celle qui doit l’emporter ?

Sur ce point précis, il est intéressant de noter qu’un athée comme André Comte-Sponville rejoint Jean-Paul II pour dénoncer l’idéalisation du système démocratique qui ne saurait en lui-même trouver une solution à nos interrogations éthiques : "Si on considère que la démocratie tient lieu de morale, on est dans la barbarie démocratique. On ne vote pas sur le Bien et le Mal. Cela ne relève pas du peuple, cela relève de la conscience individuelle de chacun." [19] (...) « En réalité, la démocratie ne peut être élevée au rang d’un mythe, au point de devenir un substitut de la moralité ou d’être la panacée de l’immoralité. »
« Fondamentalement, elle est un "système" et, comme tel, un instrument et non pas une fin. Son caractère "moral" n’est pas automatique, mais dépend de la conformité à la loi morale, à laquelle la démocratie doit être soumise comme tout comportement humain : il dépend donc de la moralité des fins poursuivies et des moyens utilisés. » [20]

Difficile, on le voit, même pour l’athée, de se débarrasser de toute transcendance, si tant est qu’il existe effectivement "des valeurs pour lesquelles, à tout le moins, il vaudrait la peine de prendre le risque de la mort" [21] !

Cette transcendance est d’ailleurs nécessairement postulée - à défaut de pouvoir être fondée en Dieu - à chaque référence aux fameux "droits de l’homme" chers à nos démocraties. Ainsi, même s’il ne fait plus mention de "l’Etre Suprême" de la Déclaration de 1789, le préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme, proclamée par les Nations Unies le 10 décembre 1948, évoque la "foi" des peuples des Nations Unies "dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité des droits des hommes et des femmes..."

3.3.2 Tout n’est pas comparable !

Si, dans la logique utilitariste qui prédomine dans nos sociétés démocratiques, on fait souvent appel, pour régler les inévitables conflits de valeurs qui surgissent, au principe de proportionnalité et à la théorie du bilan [22], il n’en reste pas moins qu’on ne peut comparer que des choses comparables, de même nature !

Ainsi, on ne peut qu’être surpris de voir en France le Conseil d’Etat [23] mettre en parallèle le droit des malades au développement des thérapeutiques et la réduction de l’embryon à une simple machine à produire des matériaux humains. Si, dans la cas de l’avortement, il existe quelques cas dramatiques où la vie de l’embryon peut être mise en balance avec celle de sa mère, on ne peut, pour ce qui est de la question de la recherche sur les embryons, faire entrer dans un même calcul de proportion la vie de l’embryon et un prétendu droit des malades ou des chercheurs, et ce, même si les intérêts économiques et la pression des laboratoires est grande !

Même pour un bien potentiel espéré, il n’est pas légitime, d’un point de vue moral, d’user de l’embryon humain comme d’un matériau, d’une " banque" dans laquelle puiser pour améliorer la santé d’autres humains.

3.4 : L’objection de conscience

En démocratie, c’est l’honneur du législateur que cette humilité qui lui fait parfois exprimer, par cette clause de conscience inscrite dans le texte même de telle ou telle loi, son incertitude sur le bien-fondé moral de la loi qu’il doit édicter. Une fois la loi votée, il en va aussi du respect des citoyens qui, appartenant à la minorité, n’ont pu s’opposer au vote de la loi, mais ne la considèrent pas moins comme contraire à la loi morale.

Qu’elle soit ou non prévue par la loi elle-même, l’objection de conscience est donc ce refus d’obéissance qu’une personne oppose à une loi positive, au nom de valeurs plus élevées. Pour mériter son nom, il faut bien évidemment que l’objection soit mûrie et décidée par la conscience morale et non par le simple souci d’échapper à l’obligation. Nulle lâcheté en effet chez celui qui, loin de choisir la voie de la facilité en s’exonérant de toute obligation légale, choisit en l’occurrence d’obéir à une obligation supérieure !

Deux situations peuvent se présenter.

Dans la première, l’ordre donné est objectivement mauvais : il contrevient aux exigences du bien, de la vérité, de la liberté, de la dignité de la personne humaine, etc. L’objection prend alors la forme du refus d’obéissance pur et simple. Il n’est jamais permis de commettre le mal, même si ordre en a été donné par des supérieurs et si des représailles sont à craindre.
 Le citoyen est obligé en conscience de ne pas suivre les prescriptions des autorités civiles quand ces préceptes sont contraires aux exigences de l’ordre moral, aux droits fondamentaux des personnes ou aux enseignements de l’Evangile. Le refus d’obéissance aux autorités civiles, lorsque leurs exigences sont contraires à celles de la conscience droite, trouve sa justification dans la distinction entre le service de Dieu et le service de la communauté politique. "Rendez à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu" (). "Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes" (). [24]
 Il faut respecter et traiter avec humanité les non-combattants, les soldats blessés et les prisonniers.
Les actions délibérément contraires au droit des gens et à ses principes universels, comme les ordres qui les commandent, sont des crimes. Une obéissance aveugle ne suffit pas à excuser ceux qui s’y soumettent. Ainsi l’extermination d’un peuple, d’une nation ou d’une minorité ethnique doit être condamnée comme un péché mortel. On est moralement tenu de résister aux ordres qui commandent un génocide. [25]

Dans la seconde situation, note Jean-Louis Bruguès [26], la prescription n’est pas mauvaise en elle-même ; elle est moralement recevable, mais la personne ne peut y souscrire pour des motifs profonds et graves, qui lui sont propres. Le concile Vatican II donne ainsi l’exemple de l’objection de conscience face au service militaire :
 Il semble (...) équitable que des lois pourvoient avec humanité au cas de ceux qui, pour des motifs de conscience, refusent l’emploi des armes, pourvu qu’ils acceptent cependant de servir sous une autre forme la communauté humaine. [27]

Face à la sécularisation de la société [28], qui ne voit ici le risque, pour le chrétien, de s’installer dans une dissidence systématique envers la loi moderne sous prétexte que celle-ci n’est pas la transcription juridique de ses conceptions morales. Il faut en effet prendre acte, et du pluralisme éthique de nos sociétés, et de l’écart irréductible qui existe de toutes manières entre loi morale et loi civile.

Pour avoir quelque chance d’être entendue et respectée, l’objection de conscience doit d’ailleurs accepter de devenir opinion argumentée, se frottant aux autres opinions dans un débat public qui peut être très conflictuel puisqu’il peut aller précisément jusqu’à la désobéissance civile. Comme l’écrit Paul Valadier [29], "c’est seulement ainsi que les catholiques pourront s’opposer fermement à des lois ou à des pratiques, quand ayant tenté de leur donner légitimité et fondement respectueux de l’homme, ils y auront échoué. En ce cas, et en ce cas seul, il pourra être question d’une résistance passive, qui ne sera pas la démission de celui qui contemple du haut de l’Aventin une bataille à laquelle il n’a pas participé et compte impunément les coups. Il est facile et au total stérile d’appeler les fidèles à l’opposition systématique ; cette attitude marginalise l’Eglise, la réduisant à devenir une secte close sur soi et agressive sur son environnement. Il est plus courageux et plus risqué de s’affronter aux rudesses du réel, sans doute aussi plus conforme à la logique de l’Incarnation." (p.160)

Plutôt que de prétendre constituer une "contre-société", l’Eglise doit savoir, quand il le faut, devenir un "signe de contradiction". Citons, pour illustrer ce propos et pour conclure, Karl Lehmann, évêque de Mayence et président de la Conférence épiscopale allemande :
 L’Eglise trahirait sa mission si elle n’avait de rapports qu’avec ceux qui pensent comme elle et se retirait de la société pour chercher son bonheur dans un royaume de son invention. Elle doit partager et supporter jusqu’à la limite du possible les soucis et les besoins d’une société concrète, même si parfois peut-être elle se rend suspecte d’une complicité qui pose problème. Nous avons en fin de compte sous les yeux l’exemple de Jésus Christ. Il s’est clairement séparé du péché mais ne s’est pas refusé aux hommes pécheurs. Comme Jésus, l’Eglise ne doit pas éteindre la mèche qui fume encore ni briser le roseau froissé. Ce ne sont pas les bien-portants qui ont besoin du médecin mais les malades. [30]

3.5 : L’Eglise doit-elle ou a-t-elle seulement le droit d’imposer sa morale aux autres citoyens ?

Posée ainsi, la question induit forcément une réponse négative. Puisque la liberté de conscience fait désormais partie de ces libertés fondamentales que l’Eglise revendique pour tout homme [31], elle ne saurait elle-même bafouer cette liberté en prétendant, là où elle est encore en mesure de le faire, obtenir par la contrainte ce qu’elle ne parvient pas à obtenir par la discussion argumentée et la persuasion.

Ceci dit, il faut bien voir que le libéralisme individualiste dans lequel nous baignons reléguerait volontiers la foi chrétienne au magasin des croyances personnelles, dans la sphère de l’intime et du privé. Contre cette réduction piétiste de la foi chrétienne, il nous faut rappeler les implications sociales de l’Evangile et revendiquer pour les disciples du Christ le droit de s’exprimer sur tous les sujets de société, si tant est - selon l’expression du Concile Vatican II - que "il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur." [32]

"Les chrétiens ne peuvent déserter les réalités politiques, puisque le politique est un des lieux où se joue la vie des hommes et des communautés humaines. En collaboration avec tous les hommes de bonne volonté, ils doivent enrichir la vie de la cité du ferment évangélique qui les habite." [33]

« La foi chrétienne est l’une des composantes majeures de l’histoire et de la culture européennes. Pour participer à la grande et belle tâche du “vivre ensemble”, notre foi chrétienne ne nous donne ni instruments originaux d’analyse et de stratégie, ni modèles institutionnels à appliquer : mais elle nous incite à contribuer à la recherche commune, avec tous les hommes de bonne volonté. Elle nous offre certains repères éthiques et spirituels que nous pouvons partager avec nombre de nos contemporains qui n’ont pas notre foi. » [34]

Sans donc employer nécessairement et indistinctement tous les moyens du lobbying, l’Eglise, par la voix de son magistère et par l’engagement social et politique de ses membres, est appelée à témoigner de l’Evangile dans la vie publique. Elle n’a pas à rougir de cette vérité sur l’homme qui lui vient de sa foi au Christ [35]. Nul ne saurait lui reprocher son engagement dans les questions qui traversent notre société, surtout s’il a conscience que l’enjeu n’est pas seulement la défense des intérêts particuliers de l’Eglise, mais bel et bien le service de tout homme et de tout l’homme !

3.6 : Le devoir d’obéissance des catholiques envers les autorités légitimes

Le fondement (scripturaire et théologique) et les limites de ce devoir d’obéissance ont déjà été évoqués à propos de l’autorité des lois civiles [36] puis à propos de l’objection de conscience [37].

Rappelons ici que cette obéissance est conditionnée d’une part au fait que les hommes politiques qui la revendiquent ont été légitimement investis de l’autorité, d’autre part que cette autorité s’exerce en vue du bien commun ou - ce qui revient au même - qu’elle ne va pas à l’encontre de la loi morale.

Précisons ici que, selon l’enseignement traditionnel de notre Eglise, le bien commun que la loi civile doit avoir pour but comporte 3 éléments : le respect de la personne en tant que telle, le bien-être social et enfin la paix et la sécurité [38].

3.7 : Quelle est l’obéissance due par les catholiques au magistère du pape et des évêques sur ces questions qui divisent la société et, parfois, l’Eglise elle-même ?

Une obéissance aveugle serait immorale. Quelques précisions s’imposent donc ici :

 Le magistère de l’Eglise n’est pas au-dessus de la Parole de Dieu ; il n’a pour but que de l’expliciter et a donc une autorité moindre. Par "magistère", il faut entendre ce service original du pape et des évêques qui consiste à "interpréter de façon authentique la Parole de Dieu, écrite ou transmise" , sans prétendre se substituer à elle [39]. Lorsque le recours à l’Ecriture n’est que de peu d’utilité pour réfléchir à des problèmes liés à des questions toutes nouvelles, le magistère se doit donc d’être assez humble.
 L’obéissance chrétienne requise au canon 212 du Code de Droit Canonique comporte en fait des degrés : le Code en distingue trois [40] et le Catéchisme de l’Eglise Catholique en repère au moins deux [41]. Les nuances entre ces divers modes d’adhésion à la foi transmise par le magistère de l’Eglise s’expliquent par le fait que tout, dans la doctrine catholique, n’est pas à mettre sur le même plan. Comme l’indiquait le n°11 du décret sur l’œcuménisme à Vatican II : "Il y a un ordre ou une hiérarchie des vérités de la doctrine catholique en raison de leur rapport différent avec le fondement de la foi chrétienne."
 En cas de conflit entre sa conscience et le magistère, c’est la première qu’il faut suivre !

"L’être humain doit toujours obéir au jugement certain de sa conscience" [42] ... même si elle est dans l’erreur ! Ceci dit, chacun a, dans le même temps, le grave devoir de former et d’éclairer sa conscience car, comme le disent les évêques de France, "nous sommes responsables devant notre conscience, ultime témoin de Dieu auprès de nous. Mais nous sommes responsables aussi de notre conscience" [43]. Le magistère du pape et des évêques a précisément pour rôle de contribuer à éclairer ma conscience en lui donnant un éclairage objectif, celui de la loi.
 "Les chrétiens d’esprit mûr ou adulte accueilleront donc l’enseignement autorisé de l’Eglise comme une balise qui leur indique de façon sûre les valeurs morales, et comme une aide pour un développement humain authentique. Eclairés et assistés par cet enseignement, ils prennent alors leurs responsabilités devant Dieu en ce qui concerne leurs décisions morales. Sans cesse ils partent à la recherche de la route où les appelle leur destinée éternelle. Pas à pas, cette route se dévoile à eux, à mesure qu’ils répondent fidèlement à l’amour de Dieu et à toutes les valeurs humaines authentiques." [44].

3.8 : Peut-il y avoir des stratégies différentes, entre catholiques, pour gérer l’écart qui existe entre les impératifs de la loi morale et leur traduction dans les lois civiles ?

Qu’il s’agisse du PACS, de la possibilité pour une infirmière scolaire de délivrer "la pilule du lendemain " à une mineure sans l’accord de ses parents, des débats autour de la régularisation des sans-papiers ou de la révision des lois bioéthiques de 1994, il est clair que les catholiques sont autant divisés ou du moins aussi perplexes que les autres citoyens de notre pays sur ces questions très controversées.

Des différences d’analyse et de sensibilité politique, mais aussi de responsabilités dans la société expliquent ce pluralisme qui semble légitime entre catholiques.

Il faudrait rappeler ici l’humilité du pape Paul VI en matière de doctrine sociale : "Face à des situations très variées (dans le monde), il nous est difficile de prononcer une parole unique, comme de proposer une solution qui ait valeur universelle (...) Il revient aux (diverses) communautés chrétiennes d’analyser avec objectivité la situation propre de leur pays, de l’éclairer par la lumière (...) de l’Evangile, de puiser des principes de réflexion, des normes de jugement et des directives d’action dans l’enseignement social de l’Eglise tel qu’il s’est élaboré au cours de l’histoire (...). A elles de discerner (...) les options et les engagements qu’il convient de prendre" [45].

Plus intéressante encore pour notre propos est la distinction qu’opère, en cette même année 1971, le synode des évêques, dans son document "Justice dans le monde", entre l’Eglise en tant que communauté religieuse et hiérarchique, dont la mission comporte la défense et la promotion de la dignité et des droits fondamentaux de la personne, mais qui n’a pas, en matière de justice, à offrir les " solutions concrètes d’ordre social, politique ou économique ", et les membres de l’Eglise, comme membres de la société civile : ceux-ci, dans les domaine familial, professionnel, social, culturel et politique, ont à "prendre leurs propres responsabilités, en se laissant conduire par l’esprit de l’Evangile et l’enseignement de l’Eglise" [46].

Il faut tout de même remarquer que le pluralisme entre catholiques qui, aux yeux du pape et des évêques, semble légitime en matière de législation sociale, semble l’être beaucoup moins dès qu’il s’agit de débats touchant à la vie et à la sexualité [47]. Les questions soulevées seraient-elles donc moins complexes ? Rien n’est moins sûr !

Sans doute nous faut-il ici, avec le pape Jean-Paul II, redécouvrir toute l’importance de cette vertu que la théologie morale nomme la prudence :
 "Il n’y a pas de doute que, dans l’actuelle société pluraliste, le législateur chrétien se trouve face à à des conceptions de la vie, à des lois et à des demandes de légalisation qui sont contraires à sa conscience. C’est alors la prudence chrétienne, vertu propre à l’homme politique chrétien, qui lui indiquera comment se comporter pour ne pas manquer, d’une part, à l’appel de sa conscience correctement formée, ni d’autre part à sa tâche de législateur. Il ne s’agit pas, pour le chrétien d’aujourd’hui, de sortir du monde où l’appel de Dieu l’a placé, mais de donner un témoignage de sa foi et d’être logique avec ses principes, dans les circonstances difficiles et toujours nouvelles qui caractérisent la sphère de la politique." [48]

[1Catéchisme pour adultes des évêques de France, n° 504

[2Catéchisme de l’Eglise Catholique, n° 2293 et 2295

[3Catéchisme de l’Eglise Catholique, n° 2241

[4Catéchisme de l’Eglise Catholique, n° 2297

[5Catéchisme de l’Eglise Catholique, n° 2242

[6Catéchisme pour adultes des évêques de France, n° 503

[7Décret sur l’apostolat des laïcs, n° 14

[8Décret sur la charge pastorale des évêques dans l’Eglise, n° 19

[9Catéchisme pour adultes des évêques de France, n° 504

[10Catéchisme de l’Eglise Catholique, n° 2258 ou encore encyclique Evangelium Vitae n° 57

[11Catéchisme de l’Eglise Catholique, n°1700

[12voir l’intéressante analyse du P. Jean-Louis Bruguès : "L’éthique dans un monde désenchanté" dans Documents épiscopat n° 6 (mars 1994)

[13J. Rawls, Théorie de la justice, Paris, Seuil, 1987 .- pp. 253-254

[14J. Habermas, Morale et communication. Conscience morale et activité communicationnelle, Paris, Cerf, 1986

[15Encyclique Evangelium Vitae n° 90

[16Ainsi par exemple "la paix et la moralité publique" : cf. "Morale et loi civile", 3e partie de la déclaration Donum Vitae publiée, en 1987, par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.

[17"La loi humaine ne peut punir ni proscrire tout ce qui se fait de mal car, en voulant extirper tout le mal, elle ferait disparaître en même temps beaucoup de bien." Saint Thomas d’Aquin (Ia-IIae q.91 a.4)

[18Une belle illustration en est le combat des "pro-life" et des "pro-choice" dans les débats autour de l’avortement aux USA, les premiers mettant en avant le principe du respect de la vie, les seconds celui de la liberté des femmes directement concernées.

[19André Comte-Sponville, Ethique, Morale et Politique dans Parcours les Cahiers du Grep Midi-Pyrénées, n° 9/10 (1994), pp. 214-215.

[20Jean-Paul II - Encyclique L’évangile de la vie, n° 70 .- et encyclique La splendeur de la Vérité, n° 96 à 101. Dans leur déclaration Réhabiliter la politique, les évêques de la Commission Sociale de l’Episcopat français (en date du 17 février 1999) ne disent pas autre chose : "Une vigilance s’impose devant certains types de fonctionnement démocratique qui semblent saper progressivement ces vertus mêmes dont la démocratie a besoin : c’est particulièrement le cas lorsque l’on estime qu’une décision est valable du seul fait qu’elle est le fruit d’un vote majoritaire". (n° 19)

[21Luc Ferry,L’homme-Dieu ou le sens de la vie, Paris, Grasset, 1996, p. 236

[22Convaincu que toute action a des effets bons et des effets mauvais, on cherche, dans cette perspective, à effectuer un calcul de proportion entre les effets bons et les mauvais, entre les avantages escomptés de l’acte humain envisagé et ses conséquences préjudiciables.

[23cf. son rapport publié en 1999 en vue de la révision des lois bioéthiques.

[24Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 2242.

[25Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 2313.

[26Ce théologien moraliste, devenu évêque d’Angers, est l’auteur d’un Dictionnaire de morale catholique. (Editions C.L.D., Chambray-lès-Tours, 1991) dont on pourra lire l’article " objection de conscience", pp. 296-297

[27Constitution Gaudium et spes n° 79.

[28Va-t-on invoquer l’objection de conscience pour refuser de travailler le dimanche, jour du Seigneur ?

[29Le catholique devant les lois, obéissance et désaccord in La conscience morale. Questions pour aujourd’hui, Université Catholique de Lyon, Profac, 1994, pp. 143 à 164.

[30"L’Eglise dans la société pluraliste" exposé prononcé le 25 septembre 1995 à Fulda, au cours de la séance d’ouverture de l’Assemblée plénière d’automne de la Conférence épiscopale d’Allemagne. Reproduit dans la Documentation Catholique n° 2131 du 4 février 1996, pp. 121-128.

[31Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 1782.

[32Constitution Gaudium et spes n° 1.

[33Les évêques de France, Catéchisme pour adultes, 1991, n° 572

[34Déclaration de la commission sociale de l’Episcopat Réhabiliter la politique, en date du 17 février 1999, n° 12

[35On se reportera ici avec intérêt à l’étude du P. Gaston Piétri intitulée "Démocratie et vérité" publiée dans le n° 14 (octobre 2000) de "Documents Episcopat", le bulletin du secrétariat de la Conférence des évêques de France : "Certains sont tentés de penser que, prise dans le débat démocratique, l’Eglise abandonne inévitablement le statut de ce qui est pour elle la vérité. Cette crainte résulte au moins en partie d’une confusion. Ce qui pour le chrétien en son existence croyante et en ses jugements moraux ne peut souffrir d’hésitation, c’est la centralité du Christ. Autre chose serait la centralité sociale de l’Eglise. Effectivement, à d’autres époques (...), l’Eglise a bénéficié d’une place centrale dans la société. Cette place-là est manifestement incompatible avec la structure démocratique de la société. Elle est d’autant plus incompatible avec la démocratie qu’est apparue plus fermement la différenciation des plans de vérité et des domaines d’action, et que l’Eglise catholique elle-même a reconnu nettement, par la voix du concile Vatican II, une juste autonomie des réalités terrestres (Constitution Gaudium et spes n° 36). De sa place, et de cette place uniquement, en fidélité au centre de sa foi qu’est la vérité du Christ, l’Eglise doit dire en paroles et en actes la vérité de l’homme, qu’elle souhaite voir inscrite dans les rapports sociaux." (pages 9-10).

[36cf. § III ;1.1

[37cf. § III.1.4

[38Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 1906-1909

[39Constitution Dei Verbum, n°8

[40L’assentiment de foi, la soumission religieuse de l’intelligence et de la volonté, enfin la simple révérence religieuse de l’esprit cf. CIC c750, 752 &753

[41Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 892

[42Catéchisme de l’Eglise catholique, n°1790

[43Catéchisme pour adultes, n° 502

[44Conscience et morale Déclaration doctrinale de la Conférence épiscopale irlandaise en date du 22 février 1980, § 16 - texte paru dans la Documentation catholique n° 1799 en date du 4 janvier 1981

[45Encyclique Octogesima adveniens, n°4

[46N°40-41

[47Voir par exemple la 3ème partie, intitulée "morale et loi civile", de la déclaration Donum Vitae de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, publiée en 1987. Sur la différence de traitement des questions de morale sociale et des questions de morale sexuelle, cf. l’article de Jean-Yves CALVEZ Morale sociale et morale sexuelle in Etudes n°3785 (mai 1993), pp.641-650.

[48Discours du pape prononcé le samedi 4 novembre 2000, dans le cadre du jubilé des responsables de gouvernements, des parlementaires et des hommes politiques, n°4

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février 2001

Philippe LOUVEAU

Prêtre du diocèse de Créteil, ancien équipier de PSN.
Curé doyen de la paroisse Saint-Georges à Villeneuve-Saint-Georges.

Publié: 31/01/2001