15e dimanche ordinaire

1. Il est loin le temps où l’on pouvait voir le semeur parcourir son champ en des allers et retours régulièrement espacés, lançant les grains portés dans un sac placé en bandoulière devant lui. Marchant d’un pas égal, il a comme premier souci de répéter la même largeur de geste, le même contrôle de la main pour que la semence de froment couvre régulièrement le sol tout nouvellement préparé. Et notre semeur prenait bien garde de ne pas envoyer trop de grains dans les ronces ou sur les chemins pierreux. Image perdue de nos jours mais familière à ces foules des campagnes de Galilée. Il faut admirer la pédagogie de Jésus qui utilise les observations les plus courantes des hommes de la terre pour dire quelque chose d’en haut, quelque chose du royaume de Dieu.

2. Le semeur sortit pour semer. Trois mots pleins de sens. Les disciples ont vite compris que le semeur, celui qui « sortit ce jour-là pour semer », c’était lui, Jésus. Il le leur avait dit : « Celui qui sème le bon grain, c’est le Fils de l’homme. » Il “sortit”. Le terme est important. Alors que les sages d’Israël, les docteurs de la Loi, faisaient école et qu’il fallait aller vers eux, Jésus, lui, “sortit”. On le verra et on l’entendra sur collines de Galilée comme dans les parvis du Temple, sur les places publiques comme dans les synagogues, en terre d’Israël comme terre étrangère, en Samarie et dans les pays de Tyr, de Sidon et au-delà du Jourdain. Pour rencontrer et s’adresser à tous, sans distinction de nationalité, de classe, de fortune, de pratique religieuse. Jésus sèmera “sous tous les vents”, à “tout va”, en paroles et en actes, quel que soit l’accueil qu’on lui ferait.

3. L’interprétation allégorique qui suit ne doit nous égarer. La parabole n’est pas d’abord celle du terrain mais de la Parole semée. Elle est une réponse à la question des disciples : pourquoi tant d’oppositions et si peu de succès ? Pourquoi celui que Jean appellera le Verbe, la Parole, ne fut-il pas reçu comme tel, comme l’avait annoncé le prophète Isaïe dans la première lecture : « Ainsi ma parole, dit le Seigneur, ne reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce que je veux, sans avoir accompli sa mission. » A ses disciples soucieux de résultats, inquiets devant le peu de réussite de la prédication de leur maître, il est répondu que, quel que soit le terrain, quel que soit l’accueil qu’on lui fera, le grain semé finira par trouver la bonne terre pour qu’il puisse la rendre fertile. La parabole confirme celle du levain qui fait lever irrésistiblement la pâte, celle du minuscule grain de sénevé qui fournira un abri aux oiseaux. L’ivraie n’empêchera pas la récolte. Le temps de l’ensemencement n’est pas celui de la moisson. Tel est le message donné à ses disciples avant de les envoyer en mission et à tous ceux qui les imiteront. Le grain doit d’abord être semé et l’Evangile proclamé. « On ne cache pas une lumière sous le boisseau. Elle doit être mise sur le lampadaire. »

4. Cette parabole est un appel à notre attention et un message d’espérance adressé à chacun d’entre nous. L’infertilité du chemin, du sol pierreux, l’envahissement des ronces sont autant d’images que Jésus nous présente pour illustrer notre dureté de cœur, notre indifférence spirituelle, le submergement de nos occupations. Ne cherchons pas ailleurs, autour de nous. Le Seigneur ne le fait pas pour nous condamner mais pour nous rendre attentif et nous faire mettre à sa disposition cette bonne terre qui pourra porter du fruit. Notre champ aussi est ensemencé d’ivraie et nous savons bien qu’elle continuera à s’y faire une place tant que nous vivrons. Thérèse de Lisieux disait en sa prime jeunesse qu’elle voulait être une sainte mais comprit plus tard qu’il n’y avait qu’un chemin, la « petite voie ». Elle écrit : « Les directeurs (de conscience) font avancer dans la perfection en faisant faire un grand nombre d’actes de vertu et ils ont raison, mais mon directeur qui est Jésus ne m’apprend pas à compter mes actes ; il m’enseigne à tout faire par amour… Cela se fait dans la paix, dans l’abandon, c’est Jésus qui fait tout et moi rien. »

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 16/07/2023