19e dimanche ordinaire

1. « Si tu veux vivre quelque chose d’extraordinaire, prends le risque de la foi. » Ainsi s’exprimait un penseur chrétien. On ne peut trouver meilleure illustration que celui du récit de ce jour. Nous savons bien que, si nous voulons marcher, avancer en mettant un pas devant l’autre, il faut une terre ferme, et non du sable fuyant et encore moins de l’eau qui ne nous soutiendra nullement. Or mettre sa foi en Jésus, croire qu’il est l’envoyé, le Fils de Dieu, qu’il est bien vivant et présent à nos côtés, comme il l’a dit, et qu’une vie au-delà de la vie nous attend, ce sont autant de pas que l’on ne peut faire qu’à condition de passer par-dessus toutes les assurances que nous souhaitons donner à notre marche.

2. C’est de cela qu’il est question dans ce récit hautement symbolique qui semble défier les lois de la physique. Matthieu, dans son Évangile, s’adresse à une communauté bien précise aux environs des années 80, une cinquantaine d’années après la mort et la résurrection de Jésus. Ces premiers chrétiens, issus pour la plupart du milieu juif, ont été pris à parti par les autorités religieuses juives. Une assemblée de pharisiens juifs, réunis à Jamnia en 85, inscrivit dans la prière à faire quotidiennement une malédiction à leur encontre Par ailleurs ont débuté les persécutions de la part des autorités romaines pour qui n’accepte pas de rendre un culte divin à l’empereur. Enfin, l’évangélisation semble marquer le pas. Ces chrétiens se disent : le Christ, dont on attendait le retour imminent, tarde à venir. On croyait que tout devait aller très vite, que les peuples se convertiraient facilement, que le Règne de Dieu allait surgir et tout bouleverser. Mais rien ne change ! Ils sont en proie au doute.

3. Ce récit de Matthieu veut y répondre. Jésus appela ses premiers disciples, des pêcheurs du lac, à monter dans sa barque. Elle devint vite le symbole de l’Eglise naissante avec Pierre à la proue. Ils connaissaient tous l’insécurité de cette mer, ses vents contraires, ses tempêtes. L’évangéliste y trouva donc facilement les images des sentiments de ces chrétiens en proie au doute. Jésus n’était-il pas un fantôme, une illusion, un rêve utopique et eux des navigateurs en sens contraires ? Pierre est de ceux-là. Mais parce qu’il est le premier des disciples, parce qu’il a la responsabilité de ses frères dans la foi, il entend prendre une assurance et demande l’impossible : « Seigneur, si c’est bien toi…. » Il l’aura mais à une condition : qu’il ne cesse de regarder Jésus. Mais dès qu’il ne considère plus que les difficultés, le vent de la tempête, ses propres forces, il commence à sombrer. « Seigneur, sauve-moi. » C’est en regardant à nouveau son Seigneur que celui-ci peut lui prendre la main et remonter dans la barque à ses côtés. Lui, Pierre le pêcheur expérimenté du lac, sauvé de la noyade ! De la même manière que lui, le disciple le plus enthousiaste, sera sauvé de son reniement par le regard de Jésus sortant du prétoire. Et dès lors que le Seigneur fut avec eux, le vent contraire tomba.

4. On ne peut être plus clair. Et les paroles de Jésus sonnent fort : « Confiance, c’est moi… n’ayez pas peur. » Elles ont été reprises par Jean-Paul II au début de son pontificat, parce la barque de l’Eglise rencontre et rencontrera toujours des vents contraires. Cela fait partie de son histoire comme le doute fait partie de l’histoire de tout croyant. « Qui n’a jamais douté ne sait pas ce que veut dire croire. » En particulier lorsque des épreuves viennent contrer notre bonne santé, celle de nos proches et nous font perdre pied. C’est alors qu’il faut nous rendre solidaires de tous ceux et celles qui sont dans la même barque. Et tout particulièrement celle du Christ qui lui aussi y monta, cria au secours. Le regard vers son Père le sauva de la noyade dans la déréliction. En entrant dans le cortège des souffrants, rappelons-nous qu’à sa tête marche le Christ. C’est en le regardant que Pierre fut sauvé de la noyade.

Seigneur, sauve-nous de nous-mêmes et de toutes les tempêtes qui peuvent nous faire perdre pied. Prends-nous la main comme tu as pris celle de Pierre.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 13/08/2023