La pomme d’Adam

Adam et Eve, 1608 - Goltzius, Pays-Bas.

Si le fruit du péché est si dommageable pour l’homme, il n’est pas étonnant que ce dernier ait du mal à le digérer et qu’un tel fruit lui reste en travers de la gorge ! De là à l’identifier à une pomme, il y a un pas que seul un langage anatomique vulgarisé franchit lorsqu’il parle de “la pomme d’Adam” plutôt que du “cartilage thyroïde du larynx”. Le livre de la Genèse, lui, n’en dit pas tant (cf.  ; ) et la pomme d’Adam - ou plus exactement la pomme donnée par Eve à Adam - fait bel et bien partie des fantômes de la Bible, c’est à dire des objets ou personnages que l’inconscient collectif, entretenu par les publicitaires, localise à tort dans le texte biblique.

D’où vient donc cette identification très ancienne, au moins en Occident, du fruit défendu à une pomme ?

Probablement du besoin très humain de rendre concret et tangible la réalité bien énigmatique que constitue dans le texte biblique ce fruit de “l’arbre de la connaissance du bonheur et du malheur”...

Probablement aussi de la contagion d’autres récits tirés de la mythologie grecque, dans lesquels une pomme est associée à la séduction et au malheur. On pense ici à celle qui fut la première cause de la guerre de Troie. On raconte en effet qu’Eris/la Discorde, qui n’avait pas été invitée aux noces de Pélée et Thétis, lança pour se venger, au beau milieu du banquet, sa fameuse pomme d’or portant l’inscription “A la plus belle” pour semer la discorde entre Héra, Aphrodite et Athéna.

Mais il semble bien que ce soit la langue latine qui fut le principal agent de cette identification, en Occident, du fruit de la Genèse à une pomme. En latin classique en effet, le même mot “malum” désignait à la fois le mal et la pomme !

De cette double signification du même mot latin, certains se rappellent peut-être, surtout s’ils ont conservé le souvenir amusé de cet adage de potache appris jadis au lycée : "Malo esse malum malum bonis malis, quam esse bonum malum malis malis." (je préfère manger une mauvaise pomme avec de bonnes mâchoires que manger une bonne pomme avec de mauvaises mâchoires) !

Copie réalisée par le sacristain

Copie réalisée par le sacristain

...qui aurait voulu faire une carrière artistique pour mieux louer la création et qui, pour ce faire, a commencé son apprentissage en réalisant des copies d’œuvres d’art. [1]

[1Dessin de Christian Louveau © Port Saint Nicolas

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Philippe LOUVEAU

Prêtre du diocèse de Créteil, ancien équipier de PSN.
Curé doyen de la paroisse Saint-Georges à Villeneuve-Saint-Georges.

Publié: 01/03/2019