4e dimanche ordinaire

1. Au début de son évangile, Jean écrit : « Il est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas accueilli. » Tout son récit est celui d’une montée vers le calvaire. Nous venons d’entendre comment elle a commencé à Nazareth. Ses concitoyens, en lui posant la question : « Nous avons appris tout ce qui s’est passé à Capharnaüm ; fais donc de même ici dans ton lieu d’origine » annoncent celle que, deux ans plus tard, ceux du Temple de Jérusalem lui poseront au Calvaire : « Il en a sauvé d’autres. Qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Elu … Alors nous croirons en lui ! » () L’expulsion de Jésus de son village annonce l’expulsion de Jésus de Jérusalem. Chassé de son village, il fut éliminé de son peuple. La menace de mort à Nazareth devient exécution à Jérusalem.

2. Les concitoyens de Jésus ne supportèrent pas qu’il se dise plus que ce qu’ils ne le voulaient voir : un charpentier, fils d’un charpentier. Ils demandaient des preuves de ce qu’il disait être alors que Jésus leur avait demandé de l’écouter avant tout du fond d’eux-mêmes Demander des preuves, c’est se mettre à distance, installer un espace pour un face-à-face. Jésus a demandé autre chose à ceux qui l’écoutèrent, à ses disciples. Il ne veut pas discuter sur le pas de la porte, justifier ce pourquoi il est là, mais nous dit : « Entrez, asseyez-vous ! » comme nous le disons à ceux avec qui nous voulons échanger. S’assoir à côté de lui, comme le firent si souvent ses disciples, pour l’écouter, partager ses sentiments, ses projets et, en un mot, pour entrer en intimité avec lui. Comme celle qu’il dit avoir avec nous : « Demeurez en moi comme moi je demeure en vous. » Ne jugeons pas trop vite les gens de Nazareth. Qu’aurions-nous fait à leur place ? Il nous semble, à nous aussi, qu’il nous serait plus facile de vivre notre foi, qu’elle serait plus enthousiaste, plus enthousiasmante, plus facile à dire autour de nous, si nous étions exaucés comme nous le demandons, ce qui serait preuve indiscutable de notre foi. A nous aussi Jésus demande de nous assoir à côté de lui sans rien faire d’autre que de l’écouter. Il n’est point besoin de science, de théologie, de dogmes, de preuves pour appliquer cela. Mais de temps de silence comme de celui que l’on passe à côté de ceux qu’on aime. Parce que cela se passe dans l’âme qui est le plus intime de soi.

3. Les gens de Nazareth nous conduisent encore à un autre examen de conscience. Ils ne supportèrent pas que Jésus leur dise que "nul n’est prophète en son pays" et qu’ils n’étaient pas les meilleurs croyants parce qu’ils étaient juifs. Il leur rappelle cet épisode de la vie du prophète Elie qui, poussé par la faim, se rend à Sarepta, situé hors du pays juif. Ecoutons le récit tel qu’il nous est rapporté dans le livre des Rois. « Il y avait là une femme, une veuve, qui ramassait du bois. Il l’appela et dit : “Va me chercher, je t’en prie, un morceau de pain dans ta main !” Elle répondit : “Par la vie du Seigneur, ton Dieu ! Je n’ai rien de prêt, j’ai tout juste une poignée de farine dans la cruche et un petit peu d’huile dans la jarre ; quand j’aurai ramassé quelques morceaux de bois, je rentrerai et je préparerai ces aliments pour moi et pour mon fils ; nous les mangerons et puis nous mourrons.” Elie lui dit : “Ne crains pas ! Rentre et fais ce que tu as dit ; seulement, avec ce que tu as, fais-moi d’abord une petite galette et tu me l’apporteras ; tu en feras ensuite pour toi et pour ton fils. Car ainsi parle le SEIGNEUR, le Dieu d’Israël : Cruche de farine ne se videra jarre d’huile ne désemplira jusqu’au jour où le SEIGNEUR donnera la pluie à la surface du sol.” Elle s’en alla et fit comme Elie avait dit ; elle mangea, elle, lui et sa famille pendant des jours. La cruche de farine ne tarit pas, et la jarre d’huile ne désemplit pas. » A leur manque de confiance, Jésus opposait celle de cette païenne, leur disait qu’elle était meilleure qu’ils le pensaient parce qu’elle n’était pas juive. Nous aussi avons vite fait de dire nos suspicions et doutes lorsque l’autre réussit mieux que nous, pense autrement que nous, fait autrement que nous. Une parole, une attitude peuvent nous contrarier, nous blesser insidieusement et nous voilà en train de les ruminer, et peut-être de leur faire dire bien plus que ce qu’elles signifiaient. Ainsi commencent les critiques dénigrantes et avec elles les divisions. Nous sommes devenus prisonniers de nos ressentiments, causes de notre mauvaise humeur, de notre mal-être. Alors il nous faut nous asseoir en nous-mêmes, déposer à côté de nous tout ce qui est devenu lourd et nous dire que l’important n’est pas dans ce qui nous arrive mais dans ce que nous en faisons. Et le comment faire, nous l’apprendrons en regardant Jésus comme nous y invite Charles de Foucauld : « En toute occasion se demander ce que ferait le Christ et alors le faire. »

Seigneur, fais du peu et du rien que j’ai, le devoir de reconnaître que je ne suis pas le meilleur. Fais du peu et du rien que je suis un appel à venir m’asseoir près de toi.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 30/01/2022