15 octobre - Thérèse d’Avila (1515-1582)

Thérèse de Ahumada est née à une époque troublée mais riche d’événements fondateurs d’une société nouvelle. Grenade, dernière ville sous domination arabe, est rendue en 1492, année de la découverte des Amériques par Christophe Colomb entraînant avec lui beaucoup de jeunes hommes. De ce fait les couvents se remplissent de jeunes filles, pas toutes nécessairement motivées. En 1515, la bataille de Marignan est gagnée par François Ier mais celle de Pavie, en 1525, est perdue en face de celui qui, en 1529, sous le nom de Charles Quint, sera élu empereur du Saint Empire Germanique sur lequel « le soleil ne se couche jamais ». En 1519, Luther rompt avec l’Eglise. En 1536, Calvin publie « L’Institution Chrétienne ». En 1538 Henri VIII est excommunié. En 1539, organisation de la Compagnie de Jésus. Epoque de Michel-Ange, Raphaël, de Rabelais, Ronsard, du concile de Trente, de l’inquisition espagnole avec ses grands autodafés de Valladolid et de Séville (1559-1562). Le 7 octobre 1571, à Lépante, la victoire de la flotte chrétienne, sans la France, met fin à la conquête de l’occident contre les ottomans musulmans. Le pape décide de la commémorer par la fête de Notre-Dame du Rosaire. Le massacre de la Saint-Barthélémy à Paris eut lieu le 24 août 1572 quelques jours après le premier mariage du futur Henri IV, élevé dans le protestantisme.

Thérèse est née en 1515 à Avila (Castille) dans une famille juive convertie dans le passé par force. A sept ans, elle tente de partir avec son frère Rodrigue pour aller se faire trancher la tête chez les musulmans et ainsi gagner le ciel. Adolescente, très séduisante, « plus belle que belle », vive et enjouée, elle est attirée par la vie mondaine Son père la place dans un couvent comme pensionnaire contre son gré mais elle ne s’y déplaît pas. De retour pour cause de maladie, elle fugue en 1536 et entre au couvent d’Avila issu de la mouvance du mont Carmel, communauté issue dès 1240 d’un ermitage situé au mont Carmel. La règle y était très souple et Thérèse passe par des moments de grande piété mais aussi de tiédeur et de dépression. Tombée gravement malade à la suite de ses mortifications, elle doit en sortir pour être soignée par une guérisseuse qui ne fit qu’aggraver les choses jusqu’à ce qu’elle soit considérée trois jours durant comme morte, préparée pour l’inhumation. Elle restera paralysée trois ans et dit devoir sa guérison à saint Joseph. Thérèse souffrit toute sa vie mais son endurance était telle que ses sœurs murmuraient : « Dieu l’habite. »

Conversion. En 1554, à 39 ans, à la lecture des Confessions de saint Augustin et devant une statue du Christ flagellé, Thérèse passe par une conversion au miséricordieux Amour du Christ. « Le Christ, lorsque je le vis, imprima en moi son immense beauté, elle y est toujours, elle y est encore aujourd’hui ; il a suffi d’une seule fois. » Elle reprend l’oraison abandonnée.

Fondations. En 1562, après une terrible vision de l’enfer, elle quitte son couvent de l’Incarnation avec quatre autres sœurs pour aller vivre sa vocation de manière plus conforme à ses désirs au petit monastère Saint Joseph. Pauvreté, austérité limitée, mais aussi des récréations avec poésies, histoires, danses, musiques « pour rendre la vie supportable » dit-elle. De 1569 jusqu’à sa mort, elle sera La dame errante, parcourant l’Espagne dans des conditions extrêmes, avec, au début, des réticences des autorités religieuses, pour fonder seize monastères pour lesquelles elle sera la Madre.
En 1568, elle convainc Jean de la Croix, carme de l’ancienne observance, de s’y associer et fonde avec lui quatorze monastères de carmes « déchaussés ». En 1571, elle accepte de venir réformer son couvent d’origine, celui de l’Incarnation qui comptait 130 moniales qui d’abord s’y opposèrent. En 1572, elle reçoit la faveur du « mariage spirituel », c’est-à-dire la révélation de la totale union à Dieu. En 1577 elle écrit le « Château Intérieur », un guide spirituel à partir de son expérience. Elle bénéficie de phénomènes exceptionnels : visions, extases, lévitation, transverbération. Elle fut très sensible aux guerres de religion en France. Son sujet de prédilection : l’oraison mentale, longue méditation dans le silence en vue de l’union à Dieu. N’ayant pas fait d’études, elle devra en répondre devant les inquisiteurs mais sera disculpée.

Fin de vie. A 67 ans, « la pauvre vieille » comme elle se nomme, souffre depuis plusieurs années d’un bras cassé, de maladie de cœur, de rhumatismes et d’une tuberculose et probablement d’un cancer. « Il est temps de nous voir, mon Seigneur, il est temps de nous mettre en route. » Après avoir répété à plusieurs reprises : « Seigneur, je suis fille de l’Église », elle meurt le sourire aux lèvres dans la nuit du 4 au 15 octobre (la réforme grégorienne du calendrier a supprimé 11 jours). Son corps est conservé intact à Alba, mais de nombreux fragments sont distribués dans le monde comme reliques dont un doigt à Paris. Canonisée en 1622, elle est déclarée docteur de l’Eglise par Paul VI en 1970 avec Catherine de Sienne.

Ecrits : « Le Livre des fondations », « Le Château Intérieur », le « Livre de vie », « Les constitutions », « Le chemin de perfection ». Quatre cents lettres ont été retrouvées. La Fiesta de Santa Teresa est célébrée à Avila tout le mois d’octobre.

Textes choisis

1. L’amour attire l’amour. Si par une grâce du Seigneur, son amour s’imprime un jour dans votre cœur, tout nous deviendra facile ; très rapidement et sans le moindre peine nous en viendrons aux œuvres. N’attachez que peu d’importance à ce que vous avez donné, puisque vous devez tant recevoir.

2. Pour prier comme il faut, vous devez trouver une compagnie. Mais quelle meilleure compagnie que celle du Maître lui-même qui vous a enseigné la prière que vous allez réciter ? Imaginez que le Seigneur est tout près de vous. Si vous vous habituez à le garder près de vous, vous ne pourrez plus, comme on dit, vous en débarrasser. Il ne vous manquera jamais, il vous aidera dans toutes vos difficultés, il sera partout avec vous. Je ne vous demande pas de penser à lui, ni de forger quantité de concepts ou de tirer de votre esprit. Je ne vous demande que de fixer sur lui votre regard.

3. Il ferait beau voir que Dieu nous commandât clairement d’agir pour son service et que nous y refusions sous prétexte que nous préférons passer notre temps à le regarder !... Donc, allez mes filles ! Pas désolation lorsque l’obéissance vous amène à vous appliquer aux choses extérieures ; si c’est à la cuisine, comprenez que le Seigneur se trouve au milieu des marmites !

4. Le Seigneur ne nous demande que deux sciences : celles de l’amour de Sa Majesté et du prochain, voilà à quoi nous devons travailler. Cet amour que nous portons à Notre Seigneur ne doit pas être dans l’imagination, mais se montrer par les œuvres. Ne croyez pas cependant que Dieu ait besoin de nos œuvres ; il se contente de trouver en nous la volonté ferme de les accomplir. Désirant un jour faire quelque chose pour Notre Seigneur, je me disais que je ne pouvais le servir que petitement, et je m’écriais intérieurement : « Pourquoi donc, Seigneur, demandes-tu mes œuvres ? » Il me répondit : « Pour voir ta volonté, ma fille. »…

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 01/10/2017